Décidément Carthage séduit, attise les convoitises, fait tourner la tête de plusieurs Tunisiens, et attire donc de nombreux candidats. Leur nombre a déjà atteint potentiellement 61 personnes qui songent à se porter candidats aux présidentielles.
C’est du moins, le nombre d’individus qui sont allés directement, ou par la voie d’un mandataire, retirer le formulaire de parrainages auprès des services de l’Instance Supérieure Indépendante des Elections (ISIE).
Ce chiffre devrait augmenter si l’on considère que quelques-uns, qui ont annoncé leur candidature, n’ont pas encore accompli cette procédure mais ils devraient le faire s’ils entendent se présenter réellement aux élections présidentielles du 6 octobre surtout après la précision fournie par l’ISIE qui souligne qu’elle acceptera seulement les originaux des formulaires de parrainage délivrés par ses soins.
Mais, parions quand même que beaucoup auraient de grandes difficultés pour apparaitre sur la liste préliminaire des candidats retenus que l’ISIE publiera le 11 août 2024 prochain, cinq jours après la clôture des dépôts de candidatures fixée au 6 août. Qui sont ces candidats ? Et pourquoi peu ont des chances de se lancer vraiment dans la course pour Carthage ?
Examinons d’abord le profil de ces candidats qui se sont déjà déclarés publiquement, personnellement ou par la voix de leurs partisans ou proches. On peut les classer par le critère de notoriété lié à un passé politique. Parmi eux, on peut citer Abir Moussi, Abdellatif Mekki, Ayachi Zammel, Ghazi Chaouachi, Lotfi Mraihi, Mondher Zenaidi, Néji Jalloul ou Safi Said.
Toutes ces personnalités ont occupé par le passé le devant de la scène soit parce qu’ils se sont trouvés à la tête de partis politiques, soit à la tête d’un ministère, voire les deux à la fois, soit enfin parce qu’ils ont été des élus de la nation. On ne peut certes pas saisir la véritable popularité de ces personnalités sans des sondages d’opinion sérieux.
Cependant, l’on peut dire qu’elle est limitée même si par exemple le parti d’Abir Moussi disposait d’un taux intéressant d’intentions de vote, alors que les autres, sont loin de peser lourd dans l’opinion publique.
D’autres tels Kamel Akrout, Hichem Meddeb ou Olfa Hamdi ont occupé des fonctions au sein des institutions de l’Etat. Kamel Akrout a été conseiller du président à la sécurité nationale, Hichem Meddeb, colonel à l’intérieur et son porte-parole sous les Islamistes, et Olfa Hamdi dirigea Tunis-air pendant quelques mois.
Des personnalités qui ne semblent avoir aucune profondeur dans la société tunisienne, et donc très peu de chances de passer déjà le premier test de la candidature.
D’autres sont de parfaits inconnus, du moins en termes de notoriété politique, à l’instar des Abdelhamid Zidi, un économiste, Adel Daou, un colonel à la retraite, Azmi Belhaj Ahmed, un chimiste, Dhaker Lahidheb, un cardiologue, Fathi Krimi, un brigadier-chef à la police, Issam Guerfel, un avocat, Leila Hammami, universitaire à l’étranger, Malek Saïhi, le secrétaire général du mouvement des Jeunes patriotes tunisiens (qui n’a obtenu que 221 voix à Nabeul aux législatives de 2022), Mourad Messaoudi, l’ancien président de l’association des jeunes magistrats, ou Najib Hajri, un retraité diplômé finances.
Reste le cas du sulfureux, Nizar Chaâri, qui semble avoir tissé une toile parmi les jeunes par le biais d’une association d’une manière qui ne manque pas de soulever des doutes sur ses véritables objectifs.
Reste pour ces candidats de relever maintenant le défi des procédures administratives qui part de la délivrance de certains documents administratifs comme le bulletin n°3 ou les certificats de nationalité des leurs. La procédure la plus difficile à accomplir reste les parrainages qui peuvent être obtenus de trois manières différentes :
- Par dix (10) députés de l’ARP ou du Conseil national des régions et des districts
- Par quarante (40) présidents élus de collectivités locales, en fonction au moment de l’acceptation des candidatures (conseils locaux ou régionaux), les conseils municipaux étant actuellement dissous
- Par 10.000 électeurs inscrits sur le registre électoral, répartis sur, au moins, dix circonscriptions législatives, avec un minimum de 500 électeurs par circonscription.
Cette dernière façon est compliquée pour les candidats n’ayant pas derrière eux une véritable machine partisane, bien implantée et populaire. Seule Abir Moussi nous semble capable de les réunir. Les autres ne disposent pas du même potentiel même si Abdellatif Mekki pourrait bénéficier d’un coup de pouce des Nahdhaouis. Les autres paraissent bien loin surtout que la répartition des parraineurs peut s’avérer un obstacle encore plus complexe pour certains qui disposent de solidarités régionales.
Les deux autres procédures de parrainage seront tout aussi compliquées à satisfaire même si le nombre de parrains est beaucoup plus réduit, et donc théoriquement plus faciles à obtenir. Là, il s’agira de trouver des accointances politiques ou idéologiques entre les candidats et les parrains, ce qui devrait limiter sérieusement le nombre de candidats pouvant aspirer à les obtenir.
On connaitra d’ici le 6 août prochain, la date de la fin du dépôt des candidatures, leur examen par l’ISIE le 10 août, et la publication de la liste préliminaire pour distinguer les candidatures farfelues et celles qui sont plus sérieuses, mais qui auront, à notre humble avis, peu de chances d’empêcher Kais Saied d’obtenir un second et dernier bail à Carthage…