Plusieurs activistes de la cause LGBT+ en Côte d’Ivoire s’inquiètent d’une vague d’« agressions homophobes » verbales et physiques alimentée par les réseaux sociaux, qui vise depuis un mois les personnes homosexuelles et transgenres, ont-ils déclaré à l’AFP jeudi 5 septembre.
« Depuis le début du mois d’août, une trentaine d’agressions homophobes physiques ont été enregistrées » par le mouvement social LGBT+ de Côte d’Ivoire, qui regroupe différentes associations, affirme Brice Donald Dibahi, 32 ans, fondateur de l’ONG Gromo, l’une des plus actives de la communauté dans le pays.
En Côte d’Ivoire – où la loi ne pénalise pas l’homosexualité, contrairement à de nombreux pays africains –, il « y a toujours eu de l’homophobie, que ce soit dans la rue ou sur les réseaux sociaux, mais je n’ai jamais vu ce genre de soulèvement », a-t-il ajouté.
« Je n’ai jamais vu un mouvement de cette ampleur », confirme Louna, 44 ans, directrice de l’ONG Droit à la différence (DADI) et femme transgenre, qui a dû fermer le siège de son association la semaine dernière et s’apprête à quitter Abidjan. Elle affirme avoir entendu des propos menaçants ces dernières semaines dans les rues de son quartier, tel que : « Vous êtes en train de pervertir la société donc vous ne devez pas exister »
« On a peur d’aller au marché »
Cinq plaintes contre X ont été déposées pour « coups et blessures » ou « injures » ce mois-ci, rapporte Brice Donald Dibahi, précisant que les agressions ont surtout lieu dans des communes populaires d’Abidjan, comme celle de Yopougon, mais la capitale politique Yamoussoukro est également concernée, selon un habitant contacté par l’AFP qui dit avoir été menacé.
« On a peur d’aller au marché, d’aller au restaurant manger, parce qu’on ne sait jamais d’où le coup peut venir », poursuit M. Dibahi. La vague de haine a démarré sur les réseaux sociaux début août, après des rumeurs dénonçant un cas de pédocriminalité qui aurait impliqué une personne homosexuelle.
Plusieurs publications ont appelé à une marche pacifique ce week-end à Abidjan contre les « woubis », un mot né en Côte d’Ivoire et que la communauté LGBT+ a d’abord utilisé pour se désigner elle-même, avant qu’il ne devienne péjoratif. Fin 2021, la question de l’homosexualité avait surgi dans le débat public après de vifs échanges à l’Assemblée nationale. La mention de « l’orientation sexuelle » comme motif de discrimination avait été retirée du code pénal.
Sur le continent africain, l’homosexualité est criminalisée dans une trentaine de pays et certains ont récemment durci leurs lois, comme le Burkina Faso, le Ghana ou l’Ouganda. La Côte d’Ivoire est souvent considérée comme l’un des pays les plus libéraux d’Afrique de l’Ouest en matière de mœurs