L’ONG Amnesty International a accusé mardi 10 septembre les forces armées de l’est de la Libye d’avoir intensifié ces derniers mois « la répression contre les opposants politiques », de bénéficier d’une « impunité persistante pour des morts en détention » et de « violations graves des droits humains ».
Depuis la chute du dictateur Mouammar Kadhafi en 2011, la Libye est divisée en deux camps antagonistes : un gouvernement reconnu par l’Organisation des Nations unies dans l’Ouest basé à Tripoli et un exécutif parallèle contrôlant l’Est et une bonne partie du Sud affilié au clan du puissant maréchal Khalifa Haftar.
Depuis le début de l’année, « des membres de l’Agence de sûreté intérieure [ISA] » sous contrôle des forces armées du maréchal Haftar ont « arrêté sans mandat des dizaines de personnes, parmi lesquelles des hommes et des femmes de plus de 70 ans », dans la rue ou dans des lieux publics dans l’est et le sud du pays, selon Amnesty International.
Ces personnes ont été « maintenues en détention arbitraire sans pouvoir contacter ni leurs familles ni leurs avocats pendant de longues périodes allant jusqu’à dix mois », a précisé l’ONG, qui se fonde sur des témoignages d’anciens détenus, de familles de prisonniers, d’avocats et de défenseurs des droits.
« Culture de l’impunité »
Déplorant une absence de procès, Amnesty International a affirmé que « deux personnes étaient mortes en détention dans des circonstances suspectes en avril et en juillet dans des centres de l’ISA à Benghazi et à Ajdabiya » et qu’« aucune enquête indépendante et impartiale n’avait été ouverte sur leur décès ».
L’ONG a accusé l’ISA et les forces armées de l’Est d’« intensifier la répression des détracteurs et des opposants politiques », notamment des militants et des responsables, mais aussi « des poètes et des blogueurs ».
« La recrudescence des détentions arbitraires et des morts en détention montre que la culture de l’impunité permet aux groupes armés de bafouer le droit à la vie des détenus sans craindre de conséquences », a déclaré Bassam Al Kantar, spécialiste de la Libye chez Amnesty International, cité dans le communiqué.
Pour M. Al Kantar, les « morts en détention s’ajoutent à la longue liste des horreurs commises par l’ISA à l’encontre de ceux qui osent exprimer des opinions critiques à l’égard des FAAL [Forces armées arabes libyennes autoproclamées] », les forces pro-Haftar.
L’ONG a appelé « les FAAL qui contrôlent de facto l’est et le sud de la Libye » à « garantir la libération immédiate de tous les prisonniers détenus arbitrairement pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression ». Les FAAL doivent aussi, selon Amnesty International, « suspendre de leurs fonctions » les dirigeants et membres de l’ISA « raisonnablement soupçonnés de crimes relevant du droit international et de graves violations des droits humains dans l’attente d’enquêtes indépendantes et impartiales ».