Omar Cissé (InTouch) : « En Afrique, la fragmentation des espaces monétaires est un vrai problème »

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Omar Cissé, fondateur d’InTouch, célèbre cette année les 10 ans de son entreprise, qui s’est imposée comme un visage de la transformation du secteur des paiements en Afrique. Avant cette aventure, il a créé Teranga Capital, un fonds d’investissement destiné à soutenir les PME africaines. Aujourd’hui, InTouch est soutenue par des actionnaires de renom tels que TotalEnergies, Worldline, CFAO et Toyota Mobility, et est présent dans 16 pays avec 23 filiales à travers le continent. Dans cet entretien exclusif, réalisé dans le cadre de l’émission Le Grand Invité de l’Économie RFI-Jeune Afrique, Omar Cissé revient sur son parcours, les défis de l’inclusion financière et les perspectives de développement pour l’écosystème fintech en Afrique.

L’entrepreneur sénégalais pose par ailleurs un regard sur plusieurs sujets d’actualité : la place de l’Afrique dans la révolution technologique mondiale, les défis de la collaboration régionale en Afrique de l’Ouest, ou encore la nécessité de bâtir des écosystèmes financiers stables pour soutenir les jeunes entreprises. Il évoque également l’impact des crises régionales sur le secteur des paiements et la manière dont InTouch parvient malgré tout à maintenir ses opérations.


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Omar Cissé partage également sa vision de l’avenir pour les entreprises africaines, notamment en soulignant l’importance des collaborations avec des géants de la tech mondiale, tout en assurant que l’Afrique doit développer un secteur privé national fort. Il insiste sur l’importance d’une monnaie stable et de la coopération régionale pour fluidifier les échanges financiers, tout en se disant favorable à une monnaie unique pour l’Afrique. Extraits.

Jeune Afrique : InTouch a été lancé en 2014 avec l’idée de simplifier les paiements en Afrique. Quelles ont été vos principales sources d’inspiration ? Avez-vous regardé d’autres modèles africains, comme M-Pesa au Kenya ?

Omar Cissé : En effet, M-Pesa a été un précurseur et a fortement influencé le développement du mobile money dans d’autres pays, y compris en Afrique de l’Ouest francophone. Les statistiques montrent d’ailleurs que cette région commence à devenir l’une des plus avancées en termes de mobile money.

Mais nous avons aussi été inspirés par différentes expériences. Je me suis concentré sur un problème précis : comment développer l’inclusion financière en Afrique. Nous avons constaté qu’il était difficile, pour un commerçant, de gérer ses transactions, notamment par mobile. À l’heure actuelle, il y a près de 8 millions de commerçants dans le monde, dont plus de la moitié en Afrique subsaharienne. Le mobile money y est très développé, avec plus de 118 milliards de dollars de transactions chaque année.


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Avec dix ans de recul sur la digitalisation des paiements en Afrique de l’Ouest, comment avez-vous vu évoluer l’écosystème fintech ?

L’évolution du secteur a été très rapide. Au départ, nous étions principalement axés sur le dépôt et le retrait, pour 99 % des transactions, les gens utilisant ces services pour envoyer de l’argent.


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Aujourd’hui, l’écosystème a largement évolué. Le paiement et le transfert international ont pris de l’ampleur. On parle maintenant de plus de 30 milliards de dollars de transactions passant par le mobile money, y compris des envois d’argent depuis l’étranger, ce qui était impossible auparavant. Avant, l’argent arrivait en espèces et devait être retiré dans un réseau. Aujourd’hui, les paiements sont beaucoup plus diversifiés.

Les commerçants, par exemple, qui utilisaient au départ des stations-service comme celles de TotalEnergies pour recevoir des paiements, voient désormais des petits commerçants, comme ceux qui vendent du café ou des fruits dans la rue, intégrer ces solutions.

En tant que start-up ayant connu une croissance rapide, comment avez-vous structuré votre modèle économique pour rester compétitif face à des géants comme Paystack ou Flutterwave ?

Dans le secteur des fintech, l’avantage est que nous travaillons souvent ensemble. Même si nous ciblons les mêmes clients, il existe une certaine coopération au sein de cette compétition. Beaucoup de ces acteurs, principalement basés au Nigeria et en Afrique de l’Est, utilisent également notre plateforme pour effectuer des transactions.