Succès Masra, le président du premier parti d’opposition au Tchad, a annoncé son refus de participer aux élections législatives et communales prévues le 29 décembre, s’insurgeant contre un scrutin joué d’avance. « Les Transformateurs [le nom de son parti] ne participeront pas aux élections législatives de décembre », a-t-il déclaré dimanche 20 octobre devant ses militants.
Succès Masra s’exprimait lors d’une cérémonie de commémoration du 20 octobre 2022. Ce jour-là, au moins trois cents jeunes qui manifestaient contre le maintien de la junte militaire légitimant le président Mahamat Idriss Déby avaient été tués par balles par les forces de l’ordre, selon des ONG nationales et internationales. Le pouvoir avait quant à lui fait état d’une cinquantaine de victimes, sans donner de bilan plus précis.
Dénonçant un « climat délétère de dictature et de terreur » et les risques de « fraude électorale », le Groupe de concertation des acteurs politiques (GCAP, une plateforme d’opposition) avait déjà fait part, fin septembre, de sa volonté de boycotter le scrutin. « Participer à ces élections revient à cautionner un résultat qui est déjà enregistré dans les ordinateurs du camp d’en face », a estimé dimanche le plus farouche opposant du président Déby, réitérant des accusations de fraude électorale formulées pendant la présidentielle de mai.
Battu lors de cette élection, Succès Masra avait revendiqué la victoire dans un long discours sur Facebook, accusant le camp Déby d’avoir truqué les résultats. L’économiste de 41 ans, qui avait brièvement été le premier ministre de Mahamat Idriss Déby avant de s’opposer à lui dans le scrutin présidentiel, avait créé la surprise en rassemblant d’imposantes foules à travers le pays durant sa campagne.
« Malgré les incertitudes, les difficultés et les embûches, le processus tire à sa fin et les engagements pris seront respectés », a de son côté déclaré le président Déby, vendredi, confirmant la tenue des élections en fin d’année. Trois ans après avoir été proclamé chef de l’Etat par l’armée après la mort de son père, tué par des rebelles, le général Mahamat Idriss Déby, aujourd’hui âgé de 40 ans, a fait adopter par référendum une nouvelle Constitution, en décembre 2023, puis été élu président en mai. Ce scrutin a été boycotté par une partie de l’opposition et jugé « ni crédible, ni libre, ni démocratique » par la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH).