En Algérie, le ras-le-bol des étudiants en médecine

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« Le chômeur est payé, le médecin, lui, est au chômage ! » Depuis le 16 octobre, en Algérie, le ras-le-bol des étudiants en médecine a évolué en une grève largement suivie. Des manifestations ont été organisées dans différentes facultés de médecine du pays, notamment à Alger, Oran, Constantine, Sétif et Annaba pour réclamer plus de postes de résidanat, l’homologation des diplômes (pour qu’ils soient reconnus à l’étranger), l’amélioration des conditions d’encadrement et de formation dans les centres hospitalo-universitaires (CHU) ou encore des garanties d’emplois après la formation. Sans oublier la fin du gel des homologations de diplômes, mesure décidée par les autorités pour freiner l’exode des médecins à l’étranger et considérée par les étudiants comme une atteinte à leur droit individuel.

Le mouvement, qui suscite la sympathie des Algériens, a contraint le ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, Kamel Baddari, à lâcher du lest et à recevoir, le 20 octobre, des représentants des étudiants et les directeurs des facultés de médecine pour une réunion de plus de sept heures. Mais les mesures annoncées à son issue n’ont pas satisfait les milliers d’étudiants protestataires.

Parmi ces mesures figurent la promesse d’augmenter les postes de résidanat de 3 045 à 4 045 ou la mise en place d’une plateforme pour faciliter les démarches administratives. Pas assez aux yeux des étudiants, qui réclament des réformes structurelles sur la formation, les stages et un soutien financier accru.

Un système de formation en perpétuelle crise

Le concours de résidanat, étape clé dans le parcours des étudiants en médecine en Algérie, cristallise aujourd’hui les tensions. Il révèle les failles profondes d’un système de formation en perpétuelle crise, miné par le manque de postes ou la fuite massive des meilleurs vers l’étranger. Dans un entretien accordé au journal spécialisé Essaha (« Santé »), le président du Syndicat national des enseignants chercheurs hospitalo-universitaires (Snechu), Rachid Belhadj, dresse un constat alarmant.

Selon lui, l’écart entre le nombre de candidats au résidanat et les postes disponibles pose un sérieux problème. « Il est inacceptable que 5 000 candidats à Alger se battent pour seulement 850 postes de résidanat », relève-t-il. Le concours de résidanat ne doit pas être seulement un moyen de recrutement, mais un outil pour former des spécialistes répondant aux besoins du pays, insiste le professeur Belhadj.

De son côté, le gouvernement se refuse toujours à lever le gel des homologations des diplômes. Il redoute un départ massif des jeunes médecins vers l’étranger, où ils disposent de meilleures conditions de travail et des salaires plus attractifs. Des acteurs du secteur ont ainsi relevé une tendance inhabituelle, que certains jugent même « inquiétante », à l’apprentissage de l’allemand par les médecins algériens, signe que l’Allemagne, comme la France, est devenue une destination attractive à leurs yeux.

En 2018, un an avant le début de la grande contestation populaire du Hirak, les facultés de médecine du pays avaient déjà connu une grève massive des étudiants en résidanat, qui réclamaient la réforme du service civil obligatoire pour les médecins spécialistes. Le mouvement avait été durement réprimé par les autorités mais, pour de nombreux étudiants qui avaient repris les cours, l’exil futur s’était alors imposé comme la solution.

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