« Il n’y avait pas vraiment de plan »

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Le 7 juillet, 19 h 30. Les sondages s’affinent et il n’est plus l’heure d’espérer : le Rassemblement national (RN) ne sera pas la première force de l’Assemblée nationale. Depuis quarante minutes, les porte-parole du parti attendent la visioconférence où seront définis les éléments de langage, avant de les égrainer sur les plateaux de télévision. La réunion est annulée : une note suffira pour déplorer que le RN s’est heurté à une alliance « contre nature » et au « parti unique ». Mâchoires serrées, Jordan Bardella fait, à 20 h 30, une brève déclaration devant les militants. Trois quarts d’heure plus tard, Marine Le Pen descend à son tour pour donner, sourire aux lèvres, ce mot d’ordre oxymorique : loin d’une défaite, « c’est une victoire différée ». Le parti écrit depuis quarante ans le récit d’une marche inéluctable vers la victoire, Marine Le Pen se posant en garante de cet optimisme forcené.

Près de quatre mois après son échec, l’extrême droite maintient la ligne d’un scrutin manipulé par les autres partis et par la presse, qui aurait exagéré l’incompétence ou le racisme – parfois les deux – de dizaines de candidats aux législatives. Le 14 septembre, Jordan Bardella interdisait à ses parlementaires le moindre droit d’inventaire : « Ne participez pas à la tentation de l’autoflagellation et d’une introspection qui s’éterniserait. » A-t-elle seulement commencé ? Plusieurs figures du parti s’agacent aujourd’hui de l’absence de remise en question de la machine partisane, au-delà de la démission, dès le lundi 8 juillet, du directeur général, Gilles Pennelle.

« Par rapport à la gravité de ce qui s’est passé, tout le monde s’en sort bien, juge un cadre de premier plan. A chaque élection, on se dit : “Cette fois, on fait le débriefing”, personne ne dit non mais ça n’a pas lieu. Ce récit de la victoire montre qu’il n’y a pas de volonté de changer », poursuit-il, conforté par les discours victimaires du meeting de rentrée du RN, le 6 octobre, à Nice. « Dire qu’on a perdu à cause du système n’est pas faux, mais le système a utilisé les failles qu’on lui a données », concède Jean-Philippe Tanguy, président délégué du groupe RN à l’Assemblée nationale. « On ne peut avancer que si l’on tire une synthèse de nos échecs », plaide Bruno Bilde, député du Pas-de-Calais proche de Marine Le Pen, jugeant que le départ de Gilles Pennelle ne peut être un solde de tout compte.

Syndrome du « candidat fantôme »

Après le second tour des législatives, aucune réunion interne n’a permis de tirer le bilan de cette étrange campagne. Tout juste glisse-t-on qu’une note de Gilles Pennelle, réclamée par Marine Le Pen, a permis de confirmer l’impréparation des investitures. Alexandre Loubet, directeur de campagne, a également fourni un retour d’expérience. « Il semble qu’il n’y avait pas vraiment de plan Matignon », confirme un député informé des travaux de la commission nationale d’investiture (CNI). Le RN, à commencer par son président, Jordan Bardella, ne cessait de réclamer une dissolution de l’Assemblée nationale en cas de défaite macroniste aux élections européennes. « Nous sommes prêts », claironnait le parti, « prêts » à repartir aux urnes, à gouverner. Mais, le soir du 9 juin, après l’éclatante victoire du jeune dirigeant d’extrême droite aux élections européennes (31,4 % des voix), la dissolution annoncée par Emmanuel Macron prend l’état-major par surprise.

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