L‘avertissement est tombé mardi dernier, lors de son interview sur TF1 : si le gouvernement tombe avec le vote d’une motion de censure, ce qui pourrait arriver dès la semaine prochaine, « il y aura une tempête probablement assez grave » sur les marchés financiers, avait prévenu Michel Barnier. Ces derniers ont d’ailleurs déjà commencé à réagir… et les signaux négatifs s’accumulent pour la France.
Le spread, c’est-à-dire l’écart de taux, entre la France et l’Allemagne s’est creusé, jusqu’à atteindre 90 points de base. Un point haut depuis 2012. Celui-ci avait déjà bondi au moment de la dissolution et dépassé alors les 80 points. « Nous ne sommes pas dans une situation normale, quand le spread tournait autour de 20-40 points de base, mais nous ne sommes pas encore dans une zone de panique : en 2011, nous avions atteint les 190 points de base », décrit Alexandre Baradez, responsable de l’analyse marchés chez IG France, qui estime qu’en cas de chute du gouvernement, le spread pourrait alors atteindre les 100 points de base.
« Ce relèvement de la prime de risque montre que les marchés – qui ont fait preuve d’une grande mansuétude à l’égard de la France, car elle dispose d’un certain nombre d’atouts, comme la liquidité de sa dette, la solidité de ses banques, la forte diversification de son économie et l’abondance des patrimoines et revenus privés – se montrent de moins en moins patients », analyse Éric Dor, directeur des études économiques à IESEG School of Management. Une impatience qui se comprend : pour un investisseur étranger, le chaos budgétaire français est aujourd’hui totalement incompréhensible…
Défiance des investisseurs
Autre signal négatif pour la France : le taux à 10 ans français, qui avait déjà dépassé le taux portugais et espagnol, a brièvement dépassé le taux grec mercredi… Un symbole : Athènes était au bord de la faillite dix ans auparavant… Mais qu’il faut tout de même relativiser. « Le taux français n’est pas reparti à la hausse : il baisse seulement moins vite que celui des autres, ce qui est un signe de défiance, mais pas d’aversion au risque, explique Alexandre Baradez. Ce qui serait problématique, c’est que le taux français rebondisse alors que les autres baissent. Cela voudrait alors dire que les investisseurs se débarrassent des obligations françaises. »
À Découvrir
Le Kangourou du jour
Répondre
Pour l’instant, la crise n’est pas encore là… Mais les prochains jours risquent d’être tendus. Outre l’éventuel vote d’une motion de censure dans les prochains jours, l’Assemblée pourrait voter, ce jeudi 28 novembre, l’abrogation de la réforme des retraites. Vendredi, c’est l’agence de notation S & P qui rendra son verdict sur la dette de la France. Même si une dégradation de la note de la France est peu probable, elle n’est pas non plus impossible.
« Quand on regarde les fondamentaux économiques et la trajectoire des finances publiques, l’écart de note entre la France et le Portugal et l’Espagne ne se justifie plus », estime Éric Dor. La France est aujourd’hui notée AA -, soit l’équivalent d’un 17/20, tandis que la dette espagnole est dans la catégorie A (l’équivalent d’un 15/20) et la dette portugaise dans la catégorie A – (soit un 14/20).