Faut-il supprimer le pass Culture ?

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Au moment où l’État doit couper dans ses dépenses au risque de connaître le sort de la Grèce lors de la crise de sa dette en 2009 – en 2023, le PIB grec était toujours à 14 % en dessous de celui de 2009 –, voilà une très bonne piste d’économies pour le ou la future ministre de l’Économie : le pass Culture. Sur le papier, l’intention de démocratiser l’accès à la culture aux jeunes est évidemment louable.

Mais que penser d’un dispositif qui coûte 324 millions d’euros cette année, dont plus de 20 millions pour couvrir la masse salariale de 174 équivalents temps plein (ETP) ? D’un dispositif conçu essentiellement pour les jeunes issus des classes populaires et qui profitent surtout aux classes moyennes ou aisées qui « consomment » déjà de la culture ? D’un dispositif, enfin, qui devait favoriser des formes de spectacle vivant autres que les concerts et le cinéma, comme le théâtre, la danse et le cirque, et qui a notamment servi à renflouer les finances des salles d’escape games ou des éditeurs de mangas ?

16 millions d’euros pour les escape games

Dans un rapport lapidaire rendu public mardi 17 décembre, la Cour des comptes semble avoir la réponse : il faut couper les frais du pass Culture. Et pourtant, elle n’ose pas proposer cette solution aussi simple que drastique. Elle louvoie et préconise « d’inscrire sans délai la société pass Culture dans la liste des opérateurs de l’État avant d’internaliser ses équipes et ses missions au sein du ministère de la Culture dans une seconde étape » ; « d’enrichir le prochain contrat d’objectifs et de performances 2025-2027 de la société pass Culture d’indicateurs de nature plus qualitative » ; d’inscrire « en loi de finances, dès l’exercice 2025 des enveloppes de crédits pour le pass Culture cohérentes avec une nécessaire maîtrise de la dépense et un éventuel recalibrage du dispositif ».

À LIRE AUSSI Et si on supprimait… les chargés de mission prétexte ? Dommage. Il y a dans le rapport de 123 pages de l’institution de la rue de Cambon des perles de gabegie financière. Prenez les escape games. Faut-il les considérer comme une activité culturelle qui doit être soutenue par l’État ? Jusqu’ici, ce fut le cas. En effet, la part individuelle du pass Culture repose sur une totale liberté laissée à l’utilisateur dans le choix de ses pratiques. « Cette absence de contrôle effectif du caractère réellement culturel de certaines offres a, par exemple, conduit au financement pour près de 16 millions d’euros depuis le lancement du dispositif d’activités d’escape games », précise la Cour des comptes. 16 millions d’euros ! À l’issue de l’enquête, le ministère de la Culture a demandé le « déréférencement des 500 offreurs qui proposaient ce type d’activités pourtant inéligibles sur l’application ».

Une enveloppe passée de 92 à 324 millions d’euros par an

Beaucoup de jeunes Français profitent du pass Culture, et tant mieux : ils sont 82 % pour la tranche de 18 ans et plus. Hélas, parmi les jeunes issus des classes populaires, c’est-à-dire dont les parents sont peu ou pas diplômés et exercent une profession d’ouvrier ou d’employé, seuls 68 % ont activé leur pass. Cela signifie que le pass Culture profite surtout aux classes moyennes et aisées qui consomment déjà de la culture.

En mai 2024, la ministre de la Culture Rachida Dati a demandé au président de la société pass Culture de lui proposer un plan d’action visant à renforcer, dès 2025, l’impact du dispositif sur certains publics prioritaires, notamment les jeunes non scolarisés.


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Aujourd’hui, le pass est financé très largement par l’État. Or, l’objectif initial était celui d’un financement à 20 % par l’État et à 80 % par d’autres ressources, comme la contribution d’offreurs. Les autres ressources ? Elles ne représentent que 6 % aujourd’hui… « Le pass s’apparente à une dépense de guichet qui a crû très rapidement. Les crédits budgétaires pour la part individuelle ont augmenté de 92 millions en 2021 à 244 millions en 2024. Ce montant s’élève même à 324 millions en ajoutant la part collective », souligne la Cour des comptes. Alors, stop ou encore ?


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