Le Tchad, « dernier domino » occidental au Sahel, pour combien de temps ?

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« Il faut rester, et bien sûr nous resterons », déclarait, le 7 mars, Jean-Marie Bockel, « envoyé personnel » d’Emmanuel Macron, au sortir d’une entrevue avec le président tchadien de transition, Mahamat Idriss Déby. Ce dernier, hissé par un groupe de généraux sur le fauteuil de son père, Idriss Déby, tué au combat en 2021, après trois décennies d’un règne sans partage, soutenu par la France, tentera, lundi 6 mai, de légitimer par les urnes un pouvoir acquis en dehors de tout cadre constitutionnel. Un scrutin à la transparence déjà contestée par son principal rival et premier ministre, Succès Masra, qui estime que « la place de l’armée française est en France ».

Lire aussi le décryptage | Article réservé à nos abonnés Au Tchad, le ton monte à l’approche de la présidentielle du 6 mai

Paris peut-il se permettre de maintenir sa présence militaire au Tchad, alors que ses soldats ont été chassés successivement du Mali, du Burkina Faso et du Niger, et que le rejet de sa politique étrangère ne cesse de croître sur un continent balayé par un vent de souverainisme ?

Si cette rupture est aussi délicate à envisager, c’est en partie parce que la relation militaire franco-tchadienne est une longue histoire de codépendance. Le pays et ses « guerriers du désert » occupent une place particulière dans l’imaginaire de l’armée française, présente sur ce territoire de façon quasi continue depuis plus d’un siècle.

De « Limousin » à « Epervier »

Première colonie à rallier la France libre, le 26 août 1940, le Tchad reste en partie administré par l’armée française jusqu’en 1965, cinq ans après l’indépendance du pays. Depuis, le « porte-avions du désert » – comme on le surnommait en raison de sa position stratégique permettant à Paris de projeter ses troupes dans la région – détient le record du plus grand nombre d’opérations extérieures françaises.

De l’opération « Limousin » (1969-1971), pour protéger le président François Tombalbaye contre les factions rebelles venues du Soudan, à « Epervier » (1986-2014), contre l’invasion des troupes libyennes de Mouammar Kadhafi, l’armée française a successivement porté au pouvoir Hissène Habré, en 1982 [condamné, en 2016, à la prison à vie pour des crimes contre l’humanité commis durant sa présidence, jusqu’en 1990]. Elle a ensuite accompagné le renversement de ce dernier par Idriss Déby, huit ans plus tard, et bombardé les colonnes de rebelles qui menaçaient le pouvoir de ce dernier en 2019. De son côté, le Tchad a envoyé ses troupes en première ligne lorsque la France s’est engagée au Sahel contre les djihadistes, en 2013.

Un millier de soldats français sont encore aujourd’hui stationnés sur la base aérienne de N’Djamena, d’où décollent chaque jour les Mirage, ces avions de chasse qui fournissent au régime de précieux renseignements sur les mouvements rebelles aux confins du territoire.

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