C’est une vidéo de 90 secondes qui commence par un éclat de joie, finit par des larmes et devient vite un objet politique. Le 1er mai, Colombe, 60 ans, se présente au meeting du Rassemblement national (RN) à Perpignan. Elle livre à la caméra de TF1 ses difficultés du quotidien et sa foi en une personne qui n’est pas nommée mais que chacun reconnaît : « Je suis au RSA et on a du mal à vivre, on peut pas payer les factures, on a les huissiers, les menaces. Il n’y a qu’elle qui ressort du système et dit “Allez, suivez-moi, on va combattre”. »
La tirade a été vue cinq millions de fois ; le RN compte bien sur la conversion de ces « vues » en votes le 9 juin, pour les élections européennes. « Colombe, c’est la France de Marine Le Pen, la France oubliée qui vote pour elle », se réjouit Sébastien Chenu, vice-président RN de l’Assemblée nationale. Il veut croire que « cela peut être un accélérateur de particules pour la campagne de Jordan [Bardella], un booster du vote RN comme l’agression de Papy Voise en 2002 ». Selon la chronique politique, ce fait divers surmédiatisé, à deux jours du premier tour de l’élection présidentielle, avait joué un rôle dans la qualification de Jean-Marie Le Pen pour le second tour.
Le parti d’extrême droite, à commencer par Marine Le Pen et Jordan Bardella, a très vite relayé la détresse de Colombe, dont le prénom est resté plusieurs jours au menu des interviews matinales. Pas question de laisser trop longtemps certains opposants de gauche tenter de lui ravir « son » électrice, fidèle depuis Jean-Marie Le Pen.
« Toutes les Colombe du pays, nous ne devons pas les mépriser, mais les entendre, les comprendre », avait écrit le député La France insoumise de la Somme, François Ruffin, dans un long texte sur X, le lendemain de la publication de la vidéo de la sexagénaire, pendant que Léon Deffontaines, candidat communiste aux européennes, lui adressait une lettre ouverte.
Sur fond de violons tire-larmes
Marine Le Pen a donc appelé la sexagénaire, a relaté BFM-TV. Elle lui intime de « tenir bon », car « [elle] arrive » : « Voilà ce que je dis à toutes les Colombe de France », a-t-elle déclaré sur RMC et BFM-TV, lundi 6 mai. Une séquence publiée sur ses réseaux sociaux, sur fond de violons tire-larmes. Le RN sonne le tocsin contre Les Restos du Cœur, où Colombe était bénévole, en les accusant d’avoir réclamé sa « démission », en raison de sa proximité avec le parti lepéniste, selon la version de la sexagénaire. L’association dit lui avoir émis un simple « rappel au règlement » de neutralité politique.
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