En Tunisie, le régime arrête brutalement une avocate et deux chroniqueurs pour leurs critiques trop sarcastiques

Date:

« De quel pays extraordinaire parle-t-on ? Celui que la moitié des jeunes veulent quitter ?  » Pour ces deux questions lancées, mardi 7 mai sur la chaîne de télévision de Carthage, à un autre chroniqueur qui prétendait que les migrants subsahariens ambitionnaient de s’installer en Tunisie pour la « coloniser », Sonia Dahmani a été arrêtée samedi 11 mai à Tunis.

La scène, évocatrice de la répression qui s’abat sur les voix critiques du régime de Kaïs Saïed, s’est déroulée devant les caméras de France 24, dont la retransmission en direct a été interrompue.

Il était 19 h 45, samedi 11 mai à la Maison des avocats, siège de l’Ordre national des avocats tunisiens (ONAT), lorsque Maryline Dumas, la correspondante de France 24 à Tunis, effectuait son duplex en direct. Des policiers en civil, cagoulés, ont alors fait irruption dans le bâtiment, embarquant Sonia Dahmani hors du bâtiment dans une panique générale. Certaines personnes présentes ont tenté de s’interposer, avant d’être bousculées et jetées à terre. La caméra de France 24 a été renversée. Hamdi Tlili, journaliste et caméraman de la chaîne a été pris à partie et brièvement arrêté par la police qui a tenté de confisquer son matériel, lui réclamant sa carte mémoire avec insistance. L’association des correspondants étrangers en Afrique du nord, basée à Tunis, a vivement condamné le « traitement » réservé aux journalistes.

Sonia Dahmani, avocate et chroniqueuse, est accusée d’avoir tenu des propos sarcastiques sur la Tunisie, dans un contexte de répression accrue contre les migrants subsahariens, selon le décret-loi 54-2022, un texte controversé destiné officiellement à lutter contre la propagation de « fausses informations et rumeurs mensongères ». Promulgué par Kaïs Saïed en septembre 2022, il punit de cinq ans de prison et de 50 000 dinars d’amende (environ 14 900 euros) toute personne qui « utilise délibérément les réseaux de communication et les systèmes d’information pour produire, promouvoir, publier ou envoyer des fausses informations ou des rumeurs mensongères ». La peine peut aller jusqu’à dix ans de prison en cas de diffamation à l’encontre d’un fonctionnaire de l’Etat.

« Je n’ai commis aucun acte contraire à la loi »

Avant son arrestation, les déclarations de Mme Dahmani avaient rapidement provoqué des réactions parmi des personnalités publiques favorables au régime, une campagne de dénigrement contre la chroniqueuse avait été lancée sur les réseaux sociaux. Deux jours après ses propos, Sonia Dahmani avait reçu une convocation pour comparaître devant un juge à laquelle elle ne s’est pas soumise. Sous le coup d’un mandat d’amener émis par le juge, elle avait choisi de se réfugier à la Maison des avocats. « Ce n’est pas pour me dérober à la justice mais je n’ai commis aucun acte contraire à la loi », avait-elle déclaré.

Il vous reste 48.36% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Share post:

Subscribe

spot_imgspot_img

Popular

More like this
Related