couvre-feu décrété à Nouméa pour la nuit prochaine en raison d’émeutes en marge du vote sur la réforme constitutionnelle à l’Assemblée

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Véhicules incendiés, magasins pillés, affrontements entre manifestants et forces de l’ordre : des violences ont ponctué la nuit du lundi 13 mai au mardi 14 mai à Nouméa, à 17 000 kilomètres de Paris, où les députés se penchent sur une révision constitutionnelle dénoncée par les indépendantistes de Nouvelle-Calédonie.

En conséquence, le haut-commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie a annoncé un couvre-feu pour la nuit de mardi à mercredi dans l’agglomération de Nouméa, théâtre de troubles d’une « grande intensité ». Le couvre-feu est décrété de mardi 18 heures à mercredi 6 heures, a annoncé, dans un communiqué diffusé peu après 8 heures locales mardi (23 heures lundi à Paris) le représentant de l’Etat dans ce territoire du Pacifique sud. « Il pourra être reconduit autant que nécessaire », précise le texte.

En outre, tout rassemblement est interdit dans le grand Nouméa, de même que le port d’armes et la vente d’alcool dans l’ensemble de la Nouvelle-Calédonie, fait savoir le haut-commissariat qui invite les 270 000 habitants de l’archipel océanien à rester chez eux.

A l’entrée de la « capitale » calédonienne, une importante usine, spécialisée dans l’embouteillage, a été victime d’un incendie volontaire et totalement ravagée par les flammes, lundi aux alentours de 22 heures, heure locale (13 heures, heure de Paris), a constaté une journaliste de l’Agence France-Presse (AFP). Plusieurs supermarchés ont été pillés à Nouméa, mais aussi dans les villes limitrophes Dumbéa et Le Mont-Dore. Au moins deux concessions automobiles étaient également en proie aux flammes vers 23 heures, a aussi pu constater l’Agence France-Presse (AFP).

Vote solennel des députés mardi après-midi

A la tombée de la nuit, gendarmes mobiles et policiers étaient aux prises avec de jeunes manifestants masqués ou cagoulés, qui se sont notamment emparés de plusieurs ronds-points. Des feux ont été allumés sur la chaussée pour entraver la circulation, tandis que des tirs de lanceurs de balles de défense et de grenades de désencerclement se font entendre dans toute l’agglomération.

Les premières altercations avec les forces de l’ordre ont commencé pendant la journée, en marge de la mobilisation indépendantiste contre la réforme constitutionnelle examinée lundi à l’Assemblée nationale, qui vise à élargir le corps électoral aux élections provinciales, cruciales en Nouvelle-Calédonie. Etabli en 1998 par l’accord de Nouméa, le corps électoral est en effet gelé, ce qui a pour conséquence, vingt-cinq ans plus tard, de priver de droit de vote près d’un électeur sur cinq. Pour le ministre de l’intérieur et des outre-mer, Gérald Darmanin, qui a porté cette réforme constitutionnelle, cette disposition « n’est plus conforme aux principes de la démocratie ».

Mais les indépendantistes critiquent, à l’inverse, un dégel qui risque de « minoriser encore plus le peuple autochtone kanak ». Le projet gouvernemental sera soumis à un vote solennel des députés mardi après-midi. « J’ai une pensée pour les policiers (…), et singulièrement pour les gendarmes, dont on évacue en ce moment même les familles menacées de mort par des manifestants qui ne passent pas par la démocratie, mais par la violence, le tir à balles réelles, l’intimidation et les menaces de mort », a fustigé Gérald Darmanin à la tribune de l’Assemblée lundi.

Crainte de nouveaux incidents

Dans son communiqué, le haut-commissariat, qui dénonce des « troubles à l’ordre public d’une grande intensité », fait état de 36 interpellations. « Les interpellés seront présentés à la justice dans la journée », est-il précisé.

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La gendarmerie, qui est chargée de la plus grande partie de la Nouvelle-Calédonie, indiquait, en début de soirée, 26 gendarmes blessés, dont un sérieusement, à un œil, par les heurts de la journée. « Il n’a pas été recensé de blessé grave au sein de la population », dit le communiqué du haut-commissariat.

Dans la crainte de nouveaux incidents, le RAID, quatre escadrons de gendarmes mobiles et deux sections de la CRS 8, unité spécialisée dans la lutte contre les violences urbaines, arriveront en renfort, a appris l’AFP d’une source proche du dossier.

Près de Nouméa, la route qui traverse la tribu de Saint-Louis, fief indépendantiste, au Mont-Dore et qui relie le sud de l’île à Nouméa a été coupée par les forces de l’ordre, en raison de la présence de nombreux manifestants, armés de pierres, et de feux allumés sur la route.

Le quartier populaire de Montravel, à Nouméa, a également dû être coupé à la circulation à plusieurs reprises, de même que la voie express qui relie la ville au nord de l’île.

Dans un communiqué publié précédemment lundi, le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, Louis Le Franc, a condamné « les blocages de voies publiques qui ont lieu depuis ce matin et les nombreuses prises à partie des fonctionnaires de police et des militaires de la gendarmerie nationale ». Il a précisé avoir donné l’ordre du « déblocage progressif » des axes occupés pendant la journée.

Le Monde avec AFP

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