sur les baies ensoleillées de Nouméa, un dimanche presque ordinaire

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Une petite file d’attente se forme devant le fleuriste, baie de l’Orphelinat, ce dimanche à Nouméa, jour de fête des mères. « Cela fait du bien, un peu de gaîté, et cela fait tellement plaisir aux gens », sourit Laura (les personnes interrogées n’ont pas souhaité donner leurs noms), la vendeuse, en préparant un bouquet de roses rouges.

En dépit des violences, la capitale calédonienne ensoleillée a des allures paisibles dans ses quartiers sud bordant la mer. Terrasses pleines, promeneurs, familles en tenue estivale, tous expriment cependant une réalité plus sombre. On ne trouve pas de légèreté, parmi les Nouméens qui sont restés enfermés durant des jours, depuis l’explosion de violences du 13 mai, et s’autorisent ce bol d’air dominical.

« Des élèves me contactent car ils n’ont pas à manger, beaucoup ont perdu leur stage de fin d’études et la filière professionnelle de nos lycées prend un sacré coup », se désole devant la fleuriste Mohamed, professeur d’éco-gestion arrivé sur le territoire en 2022. Les cours doivent en principe reprendre le 17 juin, après les congés. Mais l’enseignant pense l’année fichue. Bouquet blanc en mains, il s’apprête avec son épouse à visiter aujourd’hui « des amis des quartiers chauds, pour leur remonter le moral ». Il s’inquiète beaucoup pour une collègue qui vit seule avec sa fille : « Les émeutiers sont à vingt mètres de chez elle. »

« Je refuse cette ambiance insouciante »

Née en Nouvelle-Calédonie, Laetitia, quadragénaire soignée, est sortie avec sa fille Chiara, étudiante en classe préparatoire aux écoles de commerce. Un groupe d’étudiants qui devaient passer les concours dans l’Hexagone, dont deux postulants à Polytechnique, est parti pour Paris ce dimanche par vol spécial. « Le vivre ensemble on y croyait, c’est un choc. On a le cœur brisé et beaucoup de mal à imaginer notre futur », confie Chiara.

La jeune femme admet avoir « toujours été préservée de tout ici, où l’on vit loin de toutes les guerres en cours ». Sa mère, elle, se dit choquée par le clivage entre les quartiers sud et ceux du nord, en proie au chaos : « Je refuse de m’attabler quelque part, de prendre le soleil, par décence. Je refuse cette ambiance insouciante. »

Baie des citrons, à midi, une foule supérieure à l’habitude a déjà rempli les parkings du bord de mer. Cristèle et Ludivine, entrepreneuses, ont bravé les barrages pour venir du quartier de Boulari, en banlieue de Nouméa, jusqu’ici vendre une « box spéciale fête des mères ». Leur voisinage est cerné par les émeutiers. « Je suis effrayée. Cela a pété de partout. Après la visite de Macron, les jeunes ont tourné dans leurs voitures avec la musique à fond comme s’ils avaient gagné la coupe du monde. » Son amie est heureuse de trouver ici un peu de calme : « Je suis seule chez moi avec mon chien. C’est super oppressant. »

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