L’ancien premier ministre socialiste Lionel Jospin (1997 à 2002) revient sur la dissolution décidée par Emmanuel Macron. Il dénonce « l’arrogance » et la « légèreté » du président de la République, dont la décision est de nature à mener le Rassemblement national au pouvoir. Le socialiste salue aussi la constitution du Nouveau Front Populaire, seule « digue », selon lui, capable de contenir le parti d’extrême droite.
Le président de la République a décidé, dimanche soir, de dissoudre l’Assemblée nationale.
Il en a le pouvoir. Mais une décision d’une telle importance ne peut se prendre à la légère. L’article 12 de la Constitution impose au président trois consultations qui, si elles ne lient pas les mains du chef de l’Etat, sont faites pour l’éclairer. Or le premier ministre, le président du Sénat et la présidente de l’Assemblée nationale ont été hostiles à cette dissolution. Une fois de plus, Emmanuel Macron a décidé seul.
Ce sont de simples avis consultatifs…
C’est vrai. Mais puisque ces avis ont été négatifs, le président pouvait se donner le temps de peser les risques qu’il faisait prendre au pays à l’heure où le Rassemblement national progresse. Au lieu de cela, il s’est pressé. Et, plus grave : il entraîne les Français dans sa précipitation. Le président dit qu’il donne la parole au peuple mais nos concitoyens vont devoir prendre des décisions lourdes dans un délai très court. La campagne des élections législatives va durer moins de quinze jours. Ce n’est pas raisonnable.
Cette décision s’imposait-elle, au vu de l’absence de majorité absolue à l’Assemblée et du résultat des élections européennes, comme le prétend le président de la République ?
Le premier argument est faible. D’autres dirigeants ont su, dans le passé, gouverner avec une majorité relative. Le président aujourd’hui n’y parvient pas, peut-être par inexpérience, et surtout parce qu’il ne sait pas dialoguer. De ce point de vue, la dissolution est un aveu d’échec. Le second argument est inquiétant. Oui, il y a eu une poussée du Rassemblement national, mais elle s’exprimait dans l’espace européen. Chez nous, la prochaine élection nationale se situait dans trois ans. En convoquant maintenant les élections législatives, le président offre au Rassemblement national l’occasion de briguer le pouvoir en France. Ce n’est pas responsable.
On a beaucoup dit que la dissolution prononcée par Jacques Chirac en 1997 était une dissolution de convenance. Diriez-vous la même chose de celle décidée par Emmanuel Macron ?
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