Elisabeth Borne, en campagne dans le Calvados, joue sa survie politique et prend date pour l’après

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La cigarette électronique dans une main, une pile de tracts dans l’autre, Elisabeth Borne se dirige doucement, mercredi 19 juin, vers le marché d’Evrecy, paisible village de 2 000 habitants du Calvados. « Bonjour messieurs dames, je viens vous voir pour les euro… Euh, les législatives. » Pas simple de s’y retrouver dans ce calendrier électoral chamboulé par la dissolution de l’Assemblée nationale.

Une retraitée interroge l’ancienne première ministre : « C’est pas ce dimanche-là ? C’est l’autre d’après ? » Voilà : le 30 juin pour le premier tour, le 7 juillet pour le second. Cette fois, il s’agit de choisir le ou la député(e) de la 6e circonscription du département, pas d’envoyer des élus au Parlement européen. Elisabeth Borne est candidate à sa propre succession. La date et les enjeux étant posés, la partie difficile de la discussion peut débuter.

Pourquoi les électeurs auraient-ils soudainement envie de soutenir le chef de l’Etat et sa représentante, trois semaines après avoir sanctionné la majorité lors des élections européennes ?

« Je ne sais pas de quel côté vous êtes… »

Denise Poulard, qui se surnomme elle-même « la mère Poulard », « plutôt de droite » et inquiète du désordre ambiant, se veut rassurante : Emmanuel Macron garde tout son soutien. « J’ai toujours voté du même côté. Je ne sais pas de quel côté vous êtes… », glisse-t-elle à Elisabeth Borne, semblant ne pas reconnaître cette candidate pourtant vue à la télé. Un jeune homme, au contraire, ne distingue que trop bien la fine silhouette de celle qui a fait adopter la réforme des retraites, en 2023, grâce au forceps de l’article 49.3 de la Constitution (qui permet de faire passer des textes sans vote au Parlement). Il se rue vers elle : « Madame, vous devriez avoir honte, le FN [Front national, devenu Rassemblement national – RN] est aux portes du pouvoir à cause de vous ! Vous avez fait passer votre loi contre l’avis de 90 % des Français. » Le dialogue tourne court.

Le risque d’une victoire du Rassemblement national (RN), de fait, n’a jamais été aussi présent dans ce territoire qui se partage entre un bocage conservateur, au sud, et la périphérie de Caen, au nord, plus progressiste. La liste de Jordan Bardella a obtenu 34 % des voix dans la circonscription, le 9 juin. Un record dans cette région jusque-là modérée, qui avait l’habitude d’épouser la houle de la politique nationale en basculant du centre gauche au centre droit, et inversement.

Mais le territoire partage aussi de nombreux maux de la France rurale. La fermeture de la maternité de Vire, 10 000 habitants, en 2013, reste dans tous les esprits, et les urgences de l’hôpital peinent à pallier le manque de médecins généralistes.

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