Le premier tour des législatives anticipées, dimanche 30 juin, approche à grand pas et le monde politique retient son souffle. Coté face, Emmanuel Macron nourrit l’espoir de retrouver une « majorité de gouvernement » malgré la déroute de son camp aux élections européennes du 9 juin. Coté pile, le désordre politique engendré par la dissolution de l’Assemblée nationale, avec une extrême droite au plus haut, menace d’éclater en crise institutionnelle après le second tour, le 7 juillet.
Alors, « qui pour gouverner la France ? », demande le chef de l’Etat dans une lettre adressée aux Français, diffusée dimanche 23 juin au soir. Tout à sa volonté de dramatiser cette échéance, où il joue autant la survie de ses 250 députés que son héritage politique, le locataire de l’Elysée promet que « la manière de gouverner doit changer profondément », quel que soit le sort que lui réserveront les électeurs.
Car le Rassemblement national (RN) conserve, selon les différents sondages, sa dynamique électorale des européennes, après avoir capté près de 40 % des voix avec Reconquête !, la formation d’Eric Zemmour. Le RN est talonné par l’alliance de gauche, le Nouveau Front populaire (NFP), alors que le camp présidentiel demeure distancé, en troisième position. Entre le bloc d’extrême droite et le bloc de gauche, Renaissance et ses alliés « tendent à ressembler à ce qu’était le MoDem de François Bayrou en 2007, une force centrale autour de 15 %, pris dans la bipolarisation droite-gauche », note Jean-Yves Dormagen, professeur de science politique à l’université de Montpellier.
Si des inconnues majeures persistent (participation, nombre de triangulaires au second tour et front républicain), qui viennent brouiller tous les pronostics électoraux, un élément s’impose comme une évidence. Avec l’impossibilité de dissoudre l’Assemblée nationale avant un an, soit d’ici à juillet 2025, le centre de gravité du quinquennat d’Emmanuel Macron se déplace de l’Elysée vers Matignon et l’Assemblée nationale. Une multitude de scénarios qui semblaient alors improbables semblent subitement plausibles. « Depuis sept ans, Emmanuel Macron sous-estime la dimension parlementaire de la Ve République », observe Thomas Ehrhard, maître de conférences en science politique à l’université Paris-II-Panthéon-Assas.
Le scénario d’une cohabitation
Une cohabitation avec l’extrême droite ou la gauche n’est pas à écarter. Mais Emmanuel Macron pourrait d’abord se retrouver à la merci d’une chambre ingouvernable, marquée par une forte hostilité à son égard. Avec le risque que les députés des oppositions se coalisent pour censurer à la moindre occasion ses gouvernements. Et que les élus de son camp, éprouvés par cette dissolution, s’émancipent en vue de la présidentielle de 2027. Le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, a très tôt sonné l’alerte. « Soit il y a une majorité claire, soit effectivement nous courons le risque d’une crise de régime », a-t-il avancé sur BFM-TV.
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