après avoir réprimé, le président William Ruto retire une loi contestée

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« 25 juin 2024 ». La date restera clé dans l’histoire du Kenya, ont martelé mercredi 26 juin les journaux de ce pays d’Afrique de l’Est, réputé pour son dynamisme économique et sa démocratie relativement stable. La veille, une foule largement pacifique, inédite par son ampleur et par sa jeunesse, a déferlé dans les grandes villes pour dire son opposition aux nouvelles taxes de la loi de finances votée ce jour-là.

A Nairobi, la capitale, sur fond de violences policières, le rassemblement a tourné à l’émeute contre les symboles du pouvoir, des milliers de manifestants parvenant à s’introduire brièvement dans le Parlement. Ils y ont déclenché des incendies, jeté des drapeaux à terre, volé des iPad et mis à sac la coquette buvette parlementaire. Certains représentants de la nation n’ont eu d’autre choix que de s’enfuir par un tunnel.

Depuis les manifestations qui ont débuté mi-juin, c’est tout l’Etat kényan qui fait face à une défiance inédite, bien au-delà de la loi budgétaire 2024-2025. Dans les cortèges, des pancartes ont grimé les députés en « cochons », eux qui figurent parmi les parlementaires les mieux payés au monde. L’exécutif n’est pas épargné, surtout le président William Ruto, élu il y a deux ans en promettant des millions d’emplois et une vie moins chère.

Ce riche homme d’affaires, parti de rien, s’est érigé en incarnation des « hustlers », ce petit peuple des débrouillards qui forment l’essentiel de l’économie. Mais depuis son arrivée au pouvoir en 2022, il a multiplié les nouvelles taxes pour faire face à la dette (67 % du PIB). Au point que le très pieux Ruto est désormais surnommé « Zakayo », du nom de Zachée, un opiniâtre collecteur d’impôts de la Bible. « Ruto must go » (« Ruto doit partir »), clament les manifestants.

« Je m’incline »

Mercredi, le président leur a fait une concession majeure. Il a retiré la loi contestée, déjà allégée de nombreuses mesures (comme une TVA de 16 % sur le pain et une taxe de 2,5 % sur les véhicules personnels). « Je m’incline et je ne promulguerai pas le projet de loi de finances 2024 », a déclaré un William Ruto solennel, mine grave et voix posée, entouré d’un aréopage de parlementaires. « Le pays a été témoin d’une large expression de mécontentement à l’égard du projet de loi tel qu’il a été adopté, qui a malheureusement entraîné des pertes de vies humaines et des destructions de biens », a-t-il ajouté.

Le ton tranche avec celui de la veille. Mardi soir, le chef de l’Etat avait prononcé un discours aux accents militaires, évoquant de « graves menaces à la sécurité nationale » et affirmant que les manifestations étaient noyautées par des « organisations criminelles ». En chef des armées, Ruto avait prôné la fermeté face « à la violence et l’anarchie ». « Il n’a même pas mentionné les morts, il n’a pas parlé des personnels de santé visés », déplore Rohin Rajani, 30 ans, qui boursicote en ligne. Il estime que le président était sur la voie d’être « labellisé comme un dictateur ».

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