“Stravinsky/Ravel” par l’ensemble Aedes et les siècles sous la direction de Matthieu Romano

Les Noces de Stravinsky et le Boléro de Ravel, c’est le programme d’un nouveau disque qui rassemble l’ensemble vocal Aedes et des musiciens de l’orchestre Les Siècles, sous la direction de Mathieu Romano, avec en son cœur une rareté, une version des Noces d’Igor Stravinsky jamais enregistrée, qui correspond à une première orchestration imaginée très tôt par le compositeur en 1919, mais abandonnée parce que trop compliquée à jouer. Pourquoi compliquée, parce que Stravinsky avait alors imaginé une partie de pianola (le pianola c’est un instrument mécanique, actionné par un pédalier, et qui lit automatiquement et à un rythme continu des rouleaux perforés). Il faut donc que les autres musiciens, chanteurs, pianistes, percussionnistes se calent dessus, et c’est très compliqué. Pour cet enregistrement Mathieu Romano a fait appel à René Bosc, qui a programmé avec lui sur un ordinateur toute la partie de pianola, gros travail musical en amont, une espèce de préalable à celui des musiciens qui se calent donc sur cette mécanique.

On entendait donc le final des Noces, une pièce chorégraphique, dont le livret, qui est écrit dans un russe ancien, et qui met en scène un mariage traditionnel à la campagne : des personnages multiples rient, boivent, préparent et encouragent les mariés. On entend la virtuosité des musiciens pour tenir le rythme, dicté de manière immuable par le pianola, et en même temps cette mécanicité ne compromet pas la multiplicité des couleurs de la partition, particulièrement fougueuse, très théâtrale, avec même de l’humour dans les timbres des voix, là c’est le tableau final, les noces sont scellées dans un mélange de joie et de douleur, de prosaïsme et de lyrisme.

Une vie, une oeuvre


59 min

C’est un objet passionnant que ce disque déjà parce qu’il donne à entendre une version des Noces au plus proche on l’imagine des intentions de l’auteur, et puis aussi parce que Matthieu Romano a eu l’idée d’y adjoindre deux autres œuvres, d’abord une chanson populaire russe qu’apparemment Stravinski a beaucoup écouté à l’époque de la composition des Noces, et puis, en fin de disque, le Boléro de Ravel. Ravel, à peu près contemporain de Stravinski qu’il admirait profondément – les Noces et le Boléro partagent une intensité musicale exceptionnelle, et puis cette forme un peu folle de crescendo et d’explosion finale. Ce qui est passionnant c’est que dans cette version, la partition de Ravel a été arrangée pour la même formation par le compositeur Robin Melchior, donc avec chœur, et surtout, ce fameux pianola qui ne triche jamais avec le tempo, or le tempo, dans le Boléro, c’est un sacré truc. 
Il faut de l’énergie pour écouter le disque, mais il vous en rend au moins autant. Transcription de la chronique radio de Lucile Commeaux

La Série musicale


57 min

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