Cannes 2024 – Le réalisateur iranien Mohammad Rasoulof : Entre répression et résilience

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Cannes 2024 – Le réalisateur iranien Mohammad Rasoulof : Entre répression et résilience

Alors que son dernier film The Seed of the Sacred Fig a été sélectionné en compétition officielle de la 77eme édition du Festival de Cannes, les autorités iraniennes ont décidé d’empêcher l’équipe du film de Mohammad Rasoulof de participer au prestigieux Festival de Cannes.

Les membres de l’équipe ont été convoqués pour des interrogatoires tendus, aboutissant à leur interdiction formelle de quitter le pays. Cette décision autoritaire a été confirmée sur X par l’avocat Babak Paknia, qui a souligné les pressions exercées sur l’équipe pour convaincre Rasoulof de retirer son film de la sélection cannoise.

Cependant, l’incertitude demeure quant à la présence du réalisateur lui-même au festival. Mohammad Rasoulof, déjà soumis à une interdiction de quitter l’Iran depuis 2017 et confronté à de nouvelles accusations devant la Cour révolutionnaire, pourrait se voir refuser l’autorisation de se rendre à Cannes pour défendre son œuvre.

Cette situation met en lumière les défis auxquels sont confrontés les artistes iraniens, soumis à des pressions politiques qui entravent leur liberté d’expression et leur participation à des événements culturels internationaux.

Mohammad Rasoulof a une histoire riche avec le Festival de Cannes, où ses films ont été sélectionnés et récompensés à plusieurs reprises dans la section Un Certain Regard. En 2011, Au revoir a remporté le Prix de la mise en scène, suivi du Prix FIPRESCI pour Les Manuscrits ne brûlent pas en 2013, et du Prix Un certain Regard pour Un homme intègre en 2017. Cependant, après le succès de ce dernier à Cannes, Rasoulof s’était vu confisquer son passeport à son retour en Iran en 2017, le privant ainsi de la liberté de voyager et de travailler à l’étranger.

En 2019, il a été condamné à un an de prison pour « propagande contre le système » et a été interdit de réaliser des films et de voyager à l’étranger. Malgré ces restrictions, Rasoulof a persévéré et a réussi à réaliser son projet cinématographique, There is no Evil – Le diable n’existe pas, en utilisant des subterfuges ingénieux pour contourner la censure.

Présenté en première à la 70ème édition du festival de Berlin en février 2020, la magnifique There is no Evil a remporté trois prix : le prestigieux Ours d’Or du Meilleur Film, le Prix de la Guilde du film et le Prix du jury œcuménique. Cependant, Rasoulof a été contraint de participer à distance à la cérémonie en raison des restrictions de voyage qui lui étaient imposées.

Peu de temps après cette reconnaissance internationale, Mohammad Rasoulof a été de nouveau confronté à l’oppression du régime iranien. En juillet 2022, avec d’autres réalisateurs, il a été incarcéré pour avoir exprimé son soutien aux manifestants civils sur les réseaux sociaux. Sa peine a duré jusqu’à février 2023, renforçant ainsi les entraves à sa liberté artistique et à sa capacité à participer à des événements internationaux tels que le Festival de Cannes. Le Festival de Cannes avait publié un communiqué pour demander leur libération immédiate.

En mai 2023, Mohammad Rasoulof avait été une fois de plus confronté à des obstacles, alors qu’il était invité à être membre du jury de la section Un Certain Regard au Festival de Cannes. Malgré cette invitation prestigieuse, il avait quand même été empêché de voyager.

Alors que son dernier film est actuellement sélectionné en compétition officielle à Cannes, la question de la présence de Mohammad Rasoulof reste en suspens, en raison des restrictions de voyage toujours en place qui font peser un lourd doute sur sa participation au festival. Cette situation met en lumière les défis auxquels sont confrontés les artistes sous des régimes autoritaires, soulignant ainsi la nécessité de défendre la liberté d’expression et l’art cinématographique dans des circonstances difficiles.

Cependant, malgré ces obstacles, Mohammad Rasoulof a continué à persévérer dans son travail cinématographique, démontrant ainsi sa résilience et sa détermination face à l’adversité. Son histoire, tout comme celle d’autres cinéastes confrontés à des régimes oppressifs, met en avant le courage et la détermination nécessaires pour créer et faire circuler des œuvres artistiques dans des environnements hostiles. Malgré la répression, ces cinéastes parviennent à travailler, à réaliser des films et même à les faire sortir d’Iran pour les présenter dans divers festivals de cinéma, témoignant ainsi de la vitalité et de la résistance de l’art face à l’oppression politique.

Neïla Driss

 

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