Confrontée à une hémorragie de talents qualifiés depuis plusieurs décennies et afin de faire face à la fuite et à l’exode massif de ses cerveaux et ses compétences, la Tunisie prépare une initiative législative.
La Tunisie fait face à une hémorragie de talents qualifiés depuis plusieurs décennies, une tendance qui s’est aggravée après 2011 avec l’instabilité politique et économique. Selon des études récentes, près de 95.000 Tunisiens, principalement des diplômés, ont quitté le pays entre 2011 et 2021.
Cette migration touche particulièrement les secteurs stratégiques comme la santé, les technologies de l’information et les sciences, menaçant le développement économique et social.
4000 médecins en moins en 10 ans
Le départ massif des médecins, estimé à plus de 4000 en dix ans, illustre l’ampleur du problème, avec des conséquences directes sur la qualité des soins, surtout dans les régions intérieures.
Par ailleurs, près de 60% des diplômés envisagent une expatriation, attirés par des pays comme la France, le Canada et l’Allemagne, qui proposent des opportunités de carrière attractives et un cadre de travail stable.
Initiative législative
C’est dans ce contexte que le président de la Commission de l’Éducation, de la Formation Professionnelle, de la Jeunesse et des Sports à l’Assemblée des Représentants du Peuple, Fakhreddine Fadhloun, a annoncé hier qu’une initiative législative visant à lutter contre la fuite des compétences tunisiennes est prête et sera soumise au Parlement.
Deux choix s’offrent à ladite commission, soit d’intégrer un point dans le projet de loi de finances pour 2025 concernant la fuite des compétences, soit de travailler sur une initiative indépendante après avoir consulté les parties concernées, telles que les ordres des médecins et des ingénieurs, ainsi que les ministères de l’Enseignement supérieur et des Finances.
Cette initiative vise à trouver une solution légale et acceptée au niveau international afin de parvenir à un accord avec les parties bénéficiaires des compétences tunisiennes, tout en préservant les droits du pays, sans nuire aux intérêts des compétences elles-mêmes.
Valoriser les talents locaux
Les causes de cette fuite sont multiples : salaires peu compétitifs, dégradation des conditions de travail, et manque de perspectives professionnelles. En parallèle, les pays d’accueil mettent en place des politiques favorables pour attirer cette main-d’œuvre qualifiée.
Pour inverser cette tendance, la Tunisie doit agir. L’amélioration des conditions de travail, des réformes dans les secteurs clés, et des incitations fiscales pour encourager l’entrepreneuriat sont essentielles.
En valorisant ses talents locaux et en renforçant ses liens avec la diaspora, le pays pourrait transformer cette crise en opportunité, stimulant ainsi son développement technologique et économique.
Fakhreddine Fadhloun souligne également un point important. Ces compétences tunisiennes, notamment des médecins, des ingénieurs et des enseignants universitaires, ont reçu une formation qui a été financée par l’État, à travers les contributions de la collectivité nationale et des contribuables en particulier.