CIFF 2024 – Hussein Fahmy : Soutenir la Palestine est notre droit

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Le grand acteur égyptien Hussein Fahmy, président du Festival international du film du Caire (CIFF), a marqué cette 45ᵉ édition par des échanges riches et francs avec la presse. Dans un effort pour partager sa vision et répondre aux interrogations sur les défis et les ambitions du festival, il a tenu à rencontrer successivement les journalistes internationaux et arabes, dans une démarche transparente et inclusive. Ces rencontres ont permis de mettre en lumière les enjeux complexes du CIFF, son engagement pour le cinéma égyptien et arabe, ainsi que sa position politique affirmée, notamment en faveur de la Palestine.

Lors de la réunion avec la presse internationale, qui comprenait des représentants de médias prestigieux comme Variety, Screen Daily, Film Verdict et Cineuropa, Hussein Fahmy a ouvert la discussion en revenant sur le rôle fondamental du CIFF dans le paysage cinématographique régional. Avec fierté, il a rappelé que le festival est le plus ancien et le plus prestigieux de la région, ancré dans l’héritage cinématographique riche de l’Égypte. Il a souligné que l’industrie cinématographique égyptienne, pilier de créativité pendant des décennies, a joué un rôle déterminant dans le développement du cinéma à travers le monde arabe. Cet héritage, selon lui, ne doit pas seulement être préservé, mais aussi réinventé pour répondre aux exigences de l’époque moderne. Hussein Fahmy a insisté sur l’importance d’attirer les jeunes générations, autant comme spectateurs que comme créateurs, afin que le cinéma égyptien reste pertinent et influence durablement la scène internationale.

Il a ensuite abordé la position affirmée du festival sur la cause palestinienne. Parlant avec passion, il a décrit le soutien indéfectible du CIFF comme un devoir moral et culturel. Selon lui, le festival ne se limite pas à amplifier cette cause à travers les films projetés, mais se veut également une plateforme de prise de position sur la scène internationale. Il a fait un parallèle avec d’autres grands festivals comme Cannes, qui n’hésitent pas à défendre des causes politiques ou sociales spécifiques, rappelant que la présence du président ukrainien au Festival de Cannes avait suscité des débats similaires. « Si eux ont le droit de défendre leurs causes, nous avons aussi le droit de défendre les nôtres », a-t-il affirmé avec force, tout en insistant sur l’importance pour le CIFF de rester une voix forte et assumée pour la justice et la solidarité envers la Palestine. Il a évoqué avec fierté le choix du film d’ouverture de cette édition, qui aborde directement la cause palestinienne, et son inclusion dans la programmation comme un geste symbolique fort.

 

CIFF 2024 – Hussein Fahmy avec la presse internationale

 

Avec la presse arabe, Hussein Fahmy a adopté un ton tout aussi sincère, abordant sans détour les nombreux défis auxquels le festival a dû faire face cette année. Il a rappelé que le CIFF avait été reporté l’année précédente à cause des événements dramatiques survenus à Gaza. « Ce n’est pas une guerre, c’est un génocide », a-t-il déclaré avec émotion, en soulignant qu’il était impossible de célébrer des festivités dans un tel contexte. Ce report a eu des conséquences financières et organisationnelles importantes : des contrats avaient déjà été conclus, des films achetés, des billets d’avion réservés, et certains membres du jury ont dû se désister en raison d’autres engagements. Malgré ces difficultés, il était impensable de reporter à nouveau cette 45ᵉ édition, compte tenu des règlements stricts de la Fédération Internationale des Associations de Producteurs de Films (FIAPF), qui n’autorise qu’une seule annulation consécutive.

Hussein Fahmy a poursuivi en expliquant les contraintes budgétaires du CIFF, tout en insistant sur l’importance des partenariats entre l’État et le secteur privé pour assurer la viabilité du festival. Il a souligné que, bien que le retour sur investissement dans la culture ne soit pas immédiat, il est essentiel pour préserver et promouvoir le patrimoine égyptien. La nouvelle équipe mise en place cette année a dû retravailler entièrement le budget et repenser l’organisation du festival. Avec une vision modernisée et ambitieuse, Hussein Fahmy veut combattre l’idée que le CIFF est un festival vieillissant. Il a exprimé sa volonté de le rendre plus accessible et attractif pour les jeunes, citant comme exemple les projections hors du centre-ville, qui ont rencontré un succès considérable avec un public au rendez-vous. Il a également mentionné le triomphe de la section Cairo Classics, des projections de films classiques restaurés qui ont affiché complet chaque soir.

Lorsque les journalistes lui ont demandé quelle était la différence entre ses précédentes expériences en tant que président du CIFF et celle-ci, Hussein Fahmy a répondu avec humilité qu’il n’avait pas changé personnellement. « Je suis toujours cet étudiant qui court pour voir des films dans ce festival », a-t-il confié. Cependant, il a reconnu que la technologie avait transformé l’organisation du festival. « Avant, nous avions des boîtes de films et des bénévoles qui couraient partout avec des voitures pour les transporter. Aujourd’hui, l’informatique a résolu bien des problèmes. »

Hussein Fahmy a également célébré la réputation grandissante du CIFF à l’international, soulignant que cette année, le festival a accueilli dix premières mondiales. Des réalisateurs comme Rashid Masharawi et Zena Abdel Baky ont attendu plusieurs mois, voire une année entière, pour présenter leurs films au CIFF, preuve de leur confiance en l’importance et la qualité de cet événement.

Interrogé sur les éventuels risques que le soutien affiché du festival à la Palestine pourrait représenter, notamment en termes de collaborations internationales, Hussein Fahmy a répondu sans détour : « Nous verrons. Et advienne ce qu’il adviendra. Comme d’autres ont le droit de s’exprimer et de défendre leurs causes, nous avons le droit de nous exprimer et de défendre les nôtres. »

Hussein Fahmy a également partagé son attachement à la préservation du patrimoine cinématographique égyptien, en évoquant son initiative de restauration de films lancée en 2022. Cette idée lui est venue après la restauration de deux films cette année-là : l’un est un film écrit par Tawfik El-Hakim intitulé Journal d’un procureur de campagne (Yaoumeyat Na’eb fe Al-Aryaf (1969), et réalisé par Tawfik Saleh, l’autre est Une chanson sur le passage (Ughnia ala el-Mamar (1972), du grand réalisateur Ali Abdel Khalek, qui venait de décéder. Depuis, le projet a pris de l’ampleur : dix films ont été restaurés pour cette édition, choisis personnellement par Hussein Fahmy pour leur importance historique, avec l’objectif d’en restaurer dix autres chaque année. Ces films sont désormais sous-titrés pour les rendre accessibles à un public international, une démarche essentielle pour préserver le patrimoine égyptien et le faire rayonner à travers le monde.

 

CIFF 2024 – Hussein Fahmy avec la presse arabe

 

Enfin, Hussein Fahmy a conclu en partageant son investissement total dans son rôle de président du festival, qu’il considère comme un rôle à part entière. « Quand je joue un personnage, je m’y consacre à 100 %. C’est pareil pour le festival. Une fois cette édition terminée, je me déconnecterai pour retrouver ma carrière d’acteur. » Ce dévouement témoigne de son engagement à faire du CIFF un événement à la fois moderne, culturellement pertinent, et profondément enraciné dans les valeurs humaines et les aspirations universelles.

Neïla Driss

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