La disparition de Jimmy Carter à l’âge de 100 ans tourne une page majeure de la diplomatie américaine, marquée par des engagements décisifs au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. De l’accord historique de Camp David en 1978, qui a transformé les relations israélo-égyptiennes, à son rôle d’observateur dans la transition démocratique tunisienne en 2014, l’ancien président américain laisse un héritage de près de quatre décennies d’engagement pour la paix et la démocratie.
Les accords de Camp David, signés sous sa présidence (1977-1981), sont souvent présentés comme le plus grand accomplissement diplomatique de Jimmy Carter. Par une médiation intense entre Anouar el-Sadate et Menahem Begin, il a supervisé la première reconnaissance officielle d’Israël par un État arabe. Cependant, cet accord, bien que marquant un tournant dans les relations israélo-égyptiennes, a été critiqué pour avoir servi principalement les intérêts d’Israël. En obtenant une normalisation avec l’Égypte et la restitution du Sinaï, Israël a renforcé sa position régionale tout en évitant toute véritable discussion sur les droits des Palestiniens ou sur l’arrêt de la colonisation, qui s’intensifiait déjà à cette époque.
Après son mandat, Jimmy Carter a poursuivi une diplomatie audacieuse et souvent en rupture avec la ligne officielle des États-Unis. En 2006, la publication de « Palestine: Peace Not Apartheid » a déclenché un vif débat. En comparant la condition des Palestiniens à l’apartheid sud-africain, il a attiré l’attention sur une question souvent éludée, tout en suscitant de nombreuses controverses dans les milieux politiques et diplomatiques américains.
L’engagement de Carter ne s’est pas limité au conflit israélo-palestinien. En Tunisie, dans le contexte post-révolutionnaire de 2011, il a joué un rôle essentiel à travers le Centre Carter. L’organisation a soutenu l’adoption de la nouvelle Constitution tunisienne en 2014, un événement salué comme une étape cruciale pour la jeune démocratie. « En adoptant une nouvelle Constitution dans un esprit de paix et de consensus, la Tunisie a envoyé un message d’espoir aux nations en quête de liberté et de démocratie », avait alors déclaré Jimmy Carter.
Lors des élections tunisiennes de 2014, le Centre Carter a déployé des observateurs internationaux, renforçant la transparence et la crédibilité du processus électoral. Pour Carter, l’expérience tunisienne représentait un modèle inspirant pour d’autres pays en transition, illustrant la possibilité d’une transition pacifique et démocratique dans une région souvent marquée par l’instabilité.
Par ailleurs, le Liban a également été une priorité pour Carter, qui s’est exprimé à plusieurs reprises sur la guerre civile qui a ravagé le pays entre 1975 et 1990. En 1978, il a fermement critiqué l’intervention militaire israélienne, mettant en garde contre les conséquences d’une occupation étrangère prolongée sur les tensions régionales. Fidèle à ses principes, il voyait dans le dialogue et la justice les seules voies pour apaiser les conflits.
Couronné par le Prix Nobel de la Paix en 2002, Jimmy Carter a incarné une diplomatie à visage humain, guidée par un engagement inébranlable envers la paix, la justice et les droits humains. De Camp David aux élections tunisiennes, il laisse un héritage indélébile, où la quête de solutions pacifiques a toujours primé sur les divisions.