Finalement et après une longue attente, les relations entre l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) et le Conseil National des régions et des districts (CNRD) viennent d’être organisées par un décret-loi en date du 13 septembre 2024 paru au Journal Officiel de la République Tunisienne n° 112 (page 4824 et suivants) du même jour. Il faut dire que des échéances législatives, notamment l’adoption du budget, approchent à grands pas et que les deux chambres sont appelées à se prononcer ensemble sur la loi du budget.
Que recouvre ce décret-loi ?
Le décret-loi est composé de trois parties, la première est la plus consistante puisqu’elle est consacrée à l’approbation des projets de loi relatifs aux accords et conventions d’investissement relatifs aux richesses nationales, les projets relatifs au budget de l’Etat et des plans de développement régionaux, des districts et nationaux. Une fois ces projets de loi approuvés par l’ARP, son président les adresse à son homonyme du CRND après en avoir informé le Chef de l’Etat. A son tour, le CRND dispose d’un délai maximal de 15 jours pour se prononcer. Dans les 48 heures qui suivent, et si le président de l’ARP ne reçoit pas de réponse, il les transmet au président de la république pour leur promulgation. Ces délais ne concernent pas les projets touchant les plans de développement. Si le CRND approuve sans amendement le projet de texte présenté, il est transmis immédiatement au président de l’ARP qui le transmet à son tour au président de la république pour promulgation. Dans le cas où le CRND n’approuve pas le projet de loi qui lui a été transmis ou lui apporte des modifications, son président le transmet au président de la république et au président de l’ARP accompagné d’un document justifiant ces amendements.
Le décret-loi prévoit la création d’une commission commune composée de dix élus à égalité, soit cinq membres de chacune des deux chambres pour proposer des solutions aux différends dans un délai de sept jours à partir de sa saisine. Puis, elle transmet la solution proposée au président de l’ARP pour le soumettre l’AG dans les trois jours de sa réception puis le transmet au président de la république pour la promulgation. Dans les cas où la commission ne parvient pas à une solution ou dans le cas où les AG des deux chambres n’approuvent pas la solution proposée, le projet est transmis par l’un des deux présidents concernés au président de la république pour promulgation. Il faut préciser que cette commission se réunit soit dans l’une, soit dans l’autre chambre sauf lorsqu’il s’agit des plans de développement où les réunions doivent se tenir au CRND. Elle élit son président, son vice-président et son rapporteur, et en cas d’égalité des voix, on procède à un tirage au sort.
Pour ce qui est des projets de loi du budget, ils sont transmis par le président de la république aux deux chambres conformément aux procédures et délais constitutionnels. Ils sont examinés au sein de commissions communes au siège de l’ARP alors que leur discussion se fera en présence des élus des deux chambres réunis en assemblée au siège de l’ARP, la présidence des séances se faisant par alternance. Les membres de l’ARP puis ceux du CNRD votent sur le projet de loi du budget par articles puis dans sur le texte dans son ensemble. Dans le cas où le texte est adopté par l’ARP et si le CNRD l’adopte mais lui apporte des amendements, une commission commune est formée pour trouver un compromis et proposer un texte unique qu’elle soumet aux présidents des deux chambres dans un délai de trois jours. Le texte est alors soumis à une nouvelle AG commune entre les deux chambres. Ici et dans tous les cas de figure, soit les deux chambres acceptent le texte proposé, et si l’ARP ne l’accepte pas ou si la commission ne parvient pas à un compromis, il est transmis au Chef de l’Etat pour promulgation. A priori, il n’y aura pas une situation de blocage qui pourrait avoir des conséquences négatives sur l’adoption d’un texte dans la mesure où si l’une des deux chambres ou les deux ensemble s’opposent à un amendement ou à un texte de compromis, il est transmis pour promulgation au président de la République. Pour le cas de la loi sur le budget, et dans le cas où elle n’est pas adoptée au 31 décembre, l’on applique l’article 78 de la constitution qui prévoit qu’elle peut être « mise en vigueur, en ce qui concerne les dépenses, par tranches trimestrielles renouvelables par décret. Les recettes sont perçues conformément aux lois en vigueur ».
La deuxième partie du décret-loi a été consacrée à la procédure de prestation du serment par le président de la République nouvellement élu (article 22) ou celui qui assure un intérim (article 23) devant les deux chambres réunies. Cette séance est convoquée par le président de l’ARP après coordination avec celui du CNRD et se tient au siège de l’ARP. Quant à la troisième partie, elle concerne le contrôle qui prévoit un échange d’informations et des rapports de contrôle d’une façon périodique entre les deux Chambres (article 25). En cas de question écrite adressée à l’un des ministres par l’un des députés des deux chambres, le président de la Chambre concernée adresse une copie de la réponse du ministre une fois reçue au président de l’autre Chambre.