Sénégal-France : « Le massacre de Thiaroye, c’est 80 ans de mensonge d’État »

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Publié le 29 novembre 2024

Lecture : 2 minutes.

« Thiaroye, symboliquement, c’est quelque chose de très fort. D’abord, parce que c’est 80 années de mensonge d’État », martèle Armelle Mabon. Autrice du Massacre de Thiaroye, histoire d’un mensonge d’État*, l’historienne française est l’une des spécialistes qui, depuis plus de vingt ans, a travaillé activement au rétablissement de la vérité sur ce « crime d’État » commis par la France coloniale. Elle revient, dans l’entretien en vidéo qu’elle a accordé à Jeune Afrique, sur ce long combat qui, timidement, semble aujourd’hui pousser la France à enfin avancer sur ce dossier.

Le 1er décembre 1944, plus de 1 600 tirailleurs sont rassemblés dans le camp militaire de Thiaroye, dans la banlieue de Dakar. Anciens prisonniers de guerre, ils réclament, depuis plusieurs jours, le paiement de leur solde. Sans succès. Les officiers font le choix de la répression sanglante. Le camp est pris d’assaut par les troupes françaises, qui tirent sur la foule de tirailleurs. Selon la version officielle, 35 d’entre eux sont tués. En réalité, ils sont entre 300 et 400 à tomber ce jour-là sous les balles françaises.


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Bataille mémorielle

Alors que le Sénégal se prépare à commémorer ce drame, le président français Emmanuel Macron a fait un pas de plus dans la reconnaissance, par Paris, de sa responsabilité. « La France se doit de reconnaître que ce jour-là, la confrontation de militaires et de tirailleurs qui exigeaient que soit versée l’entièreté de leur solde légitime a déclenché un enchaînement de faits ayant abouti à un massacre », écrit le président français, dans cette lettre datée du jeudi 28 novembre. Une évolution sémantique importante : jusque-là, la France reconnaissait, du bout des lèvres, une « répression sanglante ». « La France a reconnu ce massacre comme elle ne l’a jamais fait », a commenté Bassirou Diomaye Faye.

Les commémorations des 80 ans de ce massacre marquent-elles la fin de la bataille mémorielle qui se joue entre Paris et Dakar ? En France, des parlementaires ont lancé la procédure pour mettre en place une commission d’enquête parlementaire, qui, si elle est validée, commencera ses travaux d’ici mars 2025. En parallèle, côté sénégalais, un groupe d’historiens, de documentalistes et d’archivistes a été missionné pour tenter de faire la lumière sur les nombreuses zones d’ombre autour de ce massacre. La délégation a séjourné en France du 18 au 28 novembre. Par ailleurs, les 2 et 3 décembre prochains se tiendra un colloque international à l’université Cheikh-Anta-Diop de Dakar. Son thème ? « Le massacre du camp de Thiaroye en 1944 : enjeux historiographiques, fiction et imaginaires politiques ».

(*) Le Massacre de Thiaroye, 1er décembre 1944. Histoire d’un mensonge d’État, éditions Le Passager clandestin, 2024.

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