À Lille, la consigne redémarre avec Le Fourgon

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Ses camionnettes électriques jaune poussin, les habitants de la métropole lilloise se sont habitués à les croiser dans leur quartier, où elles effectuent des tournées. « On s’est inspirés de celles des laitiers », raconte Charles Christory, l’un des trois fondateurs de l’entreprise Le Fourgon, lancée à Wambrechies au printemps 2021.

Avec ses associés, Stéphane Dessein et Maxime Tharin, l’entrepreneur de 39 ans milite pour le réemploi des contenants en verre, contre le tout-plastique jetable. « Si les assiettes dans lesquelles nous mangeons peuvent aller au lave-vaisselle, pourquoi les bouteilles continuent-elles à remplir nos poubelles, dont le taux de recyclabilité n’est que de 26 % ? » interroge à haute voix ce père de trois enfants, qui ne sont pas pour rien dans sa prise de conscience écologique.

Lavée à 60 degrés, une bouteille en verre peut être réutilisée jusqu’à une quarantaine de fois en moyenne. « Refabriquer après chaque utilisation consomme beaucoup d’énergie. Il vaut mieux les placer dans une laveuse, avec des cycles assez fermés de façon à ne pas utiliser trop d’eau », pointe Charles Christory.

« Relancer la filière »

Une solution déjà éprouvée par le passé (apparue dans l’Hexagone à la fin du XIXe siècle, la consigne en verre a disparu au début des années 1990), économe en ressources et plus saine pour les consommateurs, inquiets des effets potentiellement délétères des particules de microplastique sur leur santé. L’idée, pourtant, n’est pas simple à remettre en place : « Il a fallu relancer la filière, dévastée en France depuis plusieurs décennies, contrairement à la Belgique ou à l’Allemagne. Tout était à recommencer… »

Coup de chance : une réflexion similaire germe à Roubaix, chez Florence Duriez. Cette ancienne directrice numérique dans la grande distribution a décidé de changer de voie pour lancer fin 2020 la société Haut la consigne, avec l’ingénieure Catherine Thiebert. Leur but ? Accompagner brasseurs, producteurs locaux et magasins sur la voie de la réutilisation. Elles sont désormais à la tête d’une vaste unité de lavage de récipients en verre installée près de Tourcoing, à Neuville-en-Ferrain.

« En termes d’apport de bouteilles, Le Fourgon est aujourd’hui notre premier partenaire », se réjouit Florence Duriez. Les deux sociétés ont pu s’appuyer l’une sur l’autre pour avancer : après les avoir collectés et triés, Le Fourgon confie une grande partie de ses différents contenants à Haut la consigne.

Le cap de la rentabilité début 2025

« Le plus difficile a été le démarrage, qui a été très coûteux, confie Charles Christory. Il faut atteindre un certain volume pour durer, ce qui nous a poussés à prendre des risques. » Le Fourgon roule pied au plancher : en trois ans et demi, l’entreprise a déjà levé 16 millions d’euros pour se développer, ouvert 18 entrepôts dans toute la France et séduit 60 000 clients, de Dunkerque à Toulouse en passant par Rennes, Angers, Nantes, Le Mans, Bordeaux, Metz, Nancy, Strasbourg, Lyon, Saint-Étienne ou encore Grenoble.

« Ce qui fait que ça marche, c’est que c’est facile pour les usagers : on dépose des caisses pleines à leur domicile, et on vient les rechercher quand elles sont vides », observe Mathilde Pilard, responsable de la croissance au Fourgon, qui compte désormais 320 salariés.

D’abord concentrée sur la distribution de boissons consignées – eau, lait, bière… –, la société nordiste a progressivement élargi sa gamme. Elle propose aujourd’hui plusieurs centaines de références de produits d’épicerie, d’hygiène, de beauté ou d’entretien.


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« On cherche à monter encore en puissance pour devenir un vrai supermarché zéro déchet, dans lequel nos clients pourraient se faire livrer en un clic une grosse partie de leurs courses, indique Charles Christory. Les mentalités commencent à évoluer. De grandes marques sentent que ça va dans le bon sens et commencent à s’y mettre, mais plutôt en mode test jusqu’à présent. »

Le Fourgon, qui devrait passer le cap de la rentabilité début 2025, continue d’accélérer. En juin dernier, une étape symbolique a été franchie : celle du million de bouteilles et de bocaux en verre récupérés par l’entreprise chaque mois. Une fierté pour ses créateurs, conscients qu’il leur reste encore beaucoup de route à parcourir : « En France, rappellent-ils, 36 millions de bouteilles en plastique sont achetées chaque jour. »


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