la France de Macron, mauvaise élève de la zone euro

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À quelques jours de l’ouverture des bureaux de vote pour les élections européennes, la dégradation de la note de la France de AA à AA- par S&P est un camouflet pour le gouvernement d’Emmanuel Macron. Mais ce carton jaune n’est pas le seul élément qui fait tache sur le bulletin de notes de la France… Si on regarde d’un peu plus près nos performances en matière de finances publiques, on peut s’apercevoir que nous méritons sûrement de monter sur le podium des pays les plus mal gérés dans la zone euro.

Plongeons-nous dans les chiffres. Si l’on s’attarde sur celui du solde budgétaire, la France a décroché l’an dernier la médaille d’argent, grâce à son dérapage de dernière minute (- 5,5 % du produit intérieur brut contre – 4,9 % initialement attendus). Seule l’Italie de Giorgia Meloni est devant nous, avec son déficit abyssal de 7,4 %. Sur la troisième marche du podium, la Slovaquie et Malte se partagent la médaille de bronze (- 4,9 %). Et la médaille en chocolat revient à nos voisins belges (- 4,4 %), à la quatrième place.

Déficit : la France, médaille d’argent en 2024

A contrario, les pays les plus vertueux affichaient en 2023 un excédent budgétaire ( +3,1 % du PIB pour Chypre, + 1,7 % pour l’Irlande et + 1,2 % pour le Portugal). Cette année, le podium des pays les plus vertueux en matière de déficit devrait rester inchangé, selon les prévisions de printemps de la Commission européenne. La France devrait, quant à elle, conserver sa médaille d’argent, derrière la Slovaquie, et devant l’Italie et la Belgique ex aequo.

Dette : la France, médaille de bronze en 2024

Concernant la dette, le classement des pires élèves change un peu… mais la France est toujours présente ! En 2023, médaille d’or pour la Grèce (161,9 % du PIB), d’argent pour l’Italie (137,3 %) et de bronze pour la France (110,6 %). L’Espagne se trouve, quant à elle, au pied du podium (107,7 %). Cette année, le classement devrait être identique, selon les prévisions de la Commission européenne. Du côté des bons élèves, c’est l’Estonie qui est montée l’an dernier sur la première marche du podium (19,6 %), suivie du Luxembourg (25,7 %) et enfin de la Lituanie (38,3 %). Un classement qui devrait demeurer le même cette année.

La trajectoire des finances publiques de la France inquiète

La France, lanterne rouge… Mais est-ce si grave ? Tout dépend de la perspective dans laquelle on se place. « D’un côté, il est difficile de défendre le bilan français car nous alignons les déficits depuis les années 1980, et cela nous place dans une position difficile vis-à-vis de nos partenaires, souligne Jérôme Creel, directeur du département des études de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Mais, de l’autre, on ne peut pas dire qu’une économie se porte bien ou mal en regardant cet unique critère : il faut regarder à quoi servent ces dépenses. »

Bien plus que notre niveau de déficit ou de dette, c’est la trajectoire qui inquiète certains économistes. « Aujourd’hui, l’Italie et la France se détachent négativement car elles sont plutôt sur une pente ascendante à moyen terme en ce qui concerne leurs taux d’endettement public, contrairement à l’Espagne ou au Portugal, analyse Charles-Henri Colombier, directeur du pôle conjoncture et perspectives de Rexecode. Il ne serait d’ailleurs pas étonnant que le taux d’intérêt français à 10 ans dépasse le taux portugais ou espagnol d’ici un an. »

La France fait, certes, partie des pires élèves, mais elle n’est pas la seule à squatter le fond de la classe. Sur les 20 pays de la zone euro, 7 n’ont pas respecté l’an dernier le critère des 3 % de déficit et 12, les 60 % de dette. Si l’on regarde la moyenne de la zone euro en termes de solde budgétaire et d’endettement, celle-ci est au-dessus des critères de Maastricht (- 3,6 % pour le premier et 88,6 % pour le second). À l’heure où un pacte budgétaire réformé s’apprête à faire son grand retour, faut-il vraiment conserver ces règles sur lesquelles les États membres ont pris l’habitude de s’asseoir ? « Il est important de conserver des règles pour éviter l’aléa moral : que certains États laissent filer leur déficit en se disant qu’ils seront, quoi qu’il arrive, renfloués par les autres », analyse Charles-Henri Colombier.

Cela dit, les limites de 3 % de déficit et de 60 % d’endettement ne sont que le résultat d’un choix arbitraire, et non celui d’une analyse économique. « Application des sanctions ou non, nous allons sûrement voir les pays considérés comme les plus vertueux mettre une pression importante sur les autres pour qu’ils rentrent dans le rang », conclut Jérôme Creel. Bientôt l’heure du carton rouge ? Sûrement, car la France est déjà dans l’œil de Bruxelles et risque d’être bientôt placée en procédure de déficit excessif par la Commission…


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