les pistes de la Fondapol pour réformer les retraites

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Économiste et ancien conseiller social de Nicolas Sarkozy à l’Élysée, Bertrand Martinot propose dans une note pour la Fondapol (Fondation pour l’innovation politique), un think tank libéral, d’introduire une dose de capitalisation dans notre système de retraites.

Le Point : Pourquoi remettre sur la table le sujet de la capitalisation ?

Bertrand Martinot : Ce système me semble pertinent, tout d’abord pour des raisons d’équité entre générations. Le taux de rendement de la retraite par répartition baisse tendanciellement au fur et à mesure que la population vieillit. Celui de la génération actuelle de retraités se situe à environ 2 % en moyenne, alors que pour ceux qui sont nés à partir de 1975, il sera en dessous de 0,5 %, même pas le taux de rendement du livret A…

À cause de la démographie, il n’y a pas d’équité entre les générations. La capitalisation serait également pertinente pour des raisons d’efficience économique : le rendement du fonds de capitalisation envisagé serait supérieur à la croissance économique et permettrait donc de financer le même niveau de pension avec, à terme, des taux de cotisation inférieurs. Ce fonds de capitalisation monterait à très long terme à 50 % du PIB, et serait en partie investi dans les fonds propres des entreprises françaises.

Comment fonctionnerait le système que vous proposez ?

À long terme, la capitalisation représenterait un tiers du système et la répartition, deux tiers. Il est important de conserver les deux piliers pour diversifier les risques, qui ne sont pas les mêmes. Pour la capitalisation, le risque est financier. Pour la répartition, il est surtout politique et démographique. Il faut aussi conserver les deux pour des raisons de faisabilité : on ne peut pas demander un double effort trop important pour les générations actuelles.

Dans mon scénario, par convention, je n’ai pas touché au niveau des pensions ni à l’âge de départ, ce qui ne change rien au raisonnement. Les partenaires sociaux géreraient ce fonds, comme ils gèrent aujourd’hui l’Agirc-Arrco. Ce système ne concernerait que les salariés du privé, mais pourrait être étendu au public si l’on changeait les règles de calcul des pensions dans le public, ce qui est un autre sujet.

Par ailleurs, la fonction publique dispose déjà d’une part de capitalisation : les syndicats gèrent un fonds de près de 45 milliards d’euros – l’Erafp. On peut également imaginer combiner ce système avec la retraite par points, comme en Suède. Pour créer un fonds de capitalisation, il faut également l’alimenter. Le faire par de l’endettement public supplémentaire serait impossible dans l’état actuel de nos finances publiques. Il faut le financer avec du « véritable argent », c’est-à-dire du travail et de l’épargne supplémentaires.

L’effort devrait être collectif. Les actifs devraient travailler plus, les entreprises subiraient des cotisations supplémentaires, les retraités actuels seraient aussi, pour la première fois lors d’une réforme des retraites, mis à contribution. L’État pourrait aussi prendre sa part : en diminuant ses dépenses, il dégagerait des marges de manœuvre pour baisser les prélèvements obligatoires et ainsi compenser en grande partie la hausse temporaire des cotisations sur les salariés et les entreprises…

On voit bien la difficulté à réformer les retraites… Pensez-vous que cela soit faisable politiquement ?

Pour le moment, non. Techniquement, les solutions existent, même si la période de transition pose beaucoup de questions. Mais politiquement… Il faut du courage et une vision de long terme. On peut déjà difficilement toucher à l’indexation des retraites sur six mois en 2025, donc ça commence mal [le gouvernement a finalement annoncé que toutes les pensions seraient revalorisées de la moitié de l’inflation en juillet, NDLR].


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Pour aider à amorcer ce nouveau système, je propose notamment une désindexation partielle des retraites pendant plusieurs années. Sans changement de discours politique radical, qu’il soit de droite ou de gauche, et la prise de conscience qu’un effort collectif est nécessaire, nous n’y arriverons pas. Mais l’absence d’action sur le sujet rendra les gouvernements encore plus impopulaires sur le long terme… Il vaut mieux être impopulaire à l’instant T, et agir.

Pour que cela fonctionne, il faut demander un effort collectif, et expliquer que ce n’est pas pour financer des dépenses publiques supplémentaires, mais pour financer l’économie, épargner pour faire face aux défis de demain – transition énergétique, forces armées, retard technologique, dépendance… –, donc se projeter dans l’avenir et renforcer les fonds propres de nos entreprises pour qu’elles investissent davantage. Il est également indispensable de protéger juridiquement ce système des tentations prédatrices de l’État pour s’assurer qu’il n’ira pas taper dans la caisse !


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