Après le ministre de l’Économie Bruno Le Maire, le ministre des Comptes publics Thomas Cazenave et l’ancien Premier ministre Gabriel Attal, c’était au tour d’Élisabeth Borne, locataire de Matignon de mai 2022 à janvier 2024, d’être auditionnée par la mission d’information sur la dégradation du déficit ce vendredi 15 novembre. Prévu à – 4,4 % dans le projet de loi de finances 2024, celui-ci a en effet dérapé à 6,1 %, selon les dernières prévisions de l’exécutif.
L’audition de l’ancienne Première ministre s’est concentrée sur les quelques semaines qui se sont écoulées entre la première alerte des services de Bercy au ministre de l’Économie, début décembre, et son départ de Matignon le 9 janvier. « J’ai été alertée mi-décembre sur les questions que se posaient les services du ministère de l’Économie sur un éventuel non-respect de l’objectif de recettes inscrit dans la loi de finances », sans disposer « d’évaluation de l’ampleur du risque » a expliqué Élisabeth Borne.
Matignon mobilisé au même moment sur la loi immigration
Face à des sénateurs s’interrogeant sur l’absence d’action de l’exécutif à ce moment-là, l’ex-cheffe du gouvernement s’est défendue en indiquant qu’il n’était plus possible d’intervenir sur le projet de loi de fin de gestion 2023, adopté fin novembre 2023, ni sur le projet de loi de finances 2024, alors en dernière lecture et adopté via un 49.3 quelques jours plus tard. Mais l’exécutif s’était alors donné la possibilité d’augmenter la TICFE (taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité) par voie réglementaire pour un montant de 5 milliards d’euros.
Interrogée sur une note des ministres de Bercy l’incitant à partager cette information, l’ancienne cheffe de l’exécutif s’est défendue en insistant sur l’absence d’évaluation de l’ampleur du risque sur les recettes, et sur la préconisation de l’administration de Bercy de ne pas communiquer. « À cette période, je suis largement mobilisée par un autre sujet, qui était la recherche de compromis avec la loi immigration […], qu’il s’agissait de faire adopter à peu près dans le même calendrier », a également rappelé Élisabeth Borne.
L’objectif d’Élisabeth Borne : tenir les dépenses
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« Ce dont je suis certaine, et ce que je considérerais être ma responsabilité en tant que Première ministre, c’était de m’assurer qu’on tenait les dépenses », a-t-elle également insisté, en rappelant qu’un décret avait « annulé de l’ordre de 5 milliards d’euros en septembre » et avait mené deux réformes de l’assurance-chômage et une réforme des retraites, ainsi que des revues de dépenses au cours des deux années passées à Matignon.
Un tour d’échauffement pour l’ancienne Première ministre. Après le Sénat, l’Assemblée nationale va elle aussi s’emparer du sujet à partir du mois de décembre, via une commission d’enquête, et auditionner responsables politiques et directeurs d’administration. « Ces travaux seront utiles pour le Parlement, qui est dans son rôle pour contrôler l’action du gouvernement. Mais il ne faut pas en espérer de révélation choc […] Évitons un procès politique », nous confiait récemment Mathieu Lefèvre, vice-président du groupe Ensemble pour la République (EPR). Le ministère de l’Économie a quant à lui confié à un comité scientifique la mission de préparer un plan d’action pour améliorer les prévisions de finances publiques.