
Candidate « Top Chef » en 2021, Chloé Charles a lancé, fin 2022, à Paris, Lago, un lieu atypique, entre le restaurant et le salon privé. Elle vient aussi de signer, avec Tiphaine de Cointet, Tiens, goûte ! (First, 2022), une BD pour donner envie de cuisiner à la maison.
« Quand j’ai dit à mes proches que je devais choisir un plat fétiche pour cette chronique, ils m’ont tous répondu : “Ah oui, tu vas parler de la darphin.” » Evidemment ! La darphin, c’est le nom français pour les hashbrown ou les rösti, c’est-à-dire une galette de patates râpées.
La recette, assez simple, ne demande que trois ingrédients : des pommes de terre, du gras, du sel. On râpe les patates, on ne les rince surtout pas pour ne pas perdre la fécule qui va servir de liant. On assaisonne, on ajoute beaucoup de beurre et on les cuit à la poêle ou au four. Dans le principe, c’est très simple, mais ça prend du temps de trouver tous les calages pour que la galette soit parfaite. Comme de bien rabattre les bords et les tasser avant de la cuire pour éviter les aspérités et qu’elle croustille plus.
Ça fait une dizaine d’années que j’en cuisine. J’ai appris à la faire quand j’étais chez Septime, à Paris, auprès du chef Bertrand Grébaut, qui, je pense, tenait la recette d’Alain Passard. A l’époque, j’étais une jeune cuisinière, ça faisait partie des rares plats que je maîtrisais au point de pouvoir les reproduire à la maison ! Au début, c’était un plat de fête que je faisais à Noël pour ma famille. Puis c’est devenu un repas du quotidien et, surtout, un basique de ma cuisine professionnelle.
Elément fédérateur
A la maison, je la prépare avec ma fille de 2 ans, qui adore mettre ses mains dans le bol pour mélanger, et c’est un repas à part entière, que je lui sers avec une petite salade verte et une sauce au yaourt. Quand j’étais cheffe itinérante, j’en faisais beaucoup, car je ne savais jamais de quel matériel de cuisine j’allais disposer, mais j’étais sûre que j’aurais toujours une poêle et une plaque à induction pour cuire la darphin. Maintenant, à Lago, où j’ai une vraie cuisine professionnelle qui me permet de m’éclater, je la sers avec un chapon et une purée d’ail aux algues par exemple. La darphin est l’élément fédérateur qui apporte du réconfort et met tout le monde d’accord.
Elle est d’autant plus importante que les clients qui réservent le restaurant pour un repas ne choisissent pas le menu. Lago a un format particulier : c’est un lieu où on peut organiser des événements à boire et à manger, ouvert sur réservation uniquement. Je ne voulais pas répéter les modèles que j’avais connus plus jeune, des chefs qui bossent quinze heures par jour du lundi au vendredi et gèrent l’administratif le week-end. Ceux qui ont dit pendant le premier confinement qu’ils étaient contents d’avoir découvert leurs enfants de 15 ans, ça me fait complètement flipper ! J’ai envie d’avoir du temps libre, montrer que c’est possible d’être cheffe d’entreprise, mère de famille, s’éclater, gagner de l’argent. Tout ça ne s’est pas fait en un jour : ça fait sept ans que je mets la bonne formule au point pour que ça marche. Et que j’affine la recette de ma darphin au gré de mes aventures. »
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