Le bras de fer engagé entre la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) et l’Etat après la nomination, le 2 avril, du Belge Marc Brys au poste de sélectionneur des Lions indomptables est en train de virer à l’aigre.
Non seulement l’instance chargée d’encadrer le football camerounais n’a pas validé la nomination du nouvel entraîneur au prétexte qu’elle n’avait pas été suffisamment consultée, mais elle a demandé à son président, l’ancien international Samuel Eto’o, de désigner lui-même un sélectionneur et un staff technique. Une logique, si elle était poussée jusqu’au bout, qui ferait des Lions indomptables la première équipe au monde dotée d’un double encadrement.
La Fécafoot peut-elle se permettre de défier aussi ouvertement le ministère des sports ? Lundi 8 avril, Samuel Eto’o a brillé par son absence lors de la signature du contrat de deux ans et demi de Marc Brys, à Yaoundé. Expliquant avoir reçu son invitation trop tardivement, il s’est justifié en disant être accaparé par les obsèques de son père, prévues de jeudi à samedi à Ngambé, à 150 kilomètres à l’ouest de Yaoundé. L’ancien attaquant, réputé pour ses coups de gueule, n’a toutefois pas jugé utile de se faire représenter par un des membres du comité exécutif de l’instance.
Quelques heures après son arrivée à Yaoundé, Marc Brys a quant à lui exprimé sa volonté de rencontrer le plus rapidement possible le président de la Fécafoot. Mais ce dernier n’a pas donné suite à la proposition de l’ancien entraîneur de Louvain.
Des prétentions salariales élevées
« Soit Samuel Eto’o a décidé d’adopter une attitude quasi suicidaire, soit il espère négocier quelque chose avec le ministre des sports. Mais on ne voit pas bien quel est son but, et surtout qui il pourrait nommer », s’interroge un ancien membre de la Fécafoot ayant requis l’anonymat.
Au ministère des sports, on se contente pour le moment de prendre acte de la brouille. L’ancienne star du FC Barcelone « est libre de faire ce qu’il veut, mais la nomination d’un autre sélectionneur serait une véritable défiance vis-à-vis de l’Etat, met en garde Cyrille Tollo, conseiller technique auprès du ministre des sports Narcisse Mouelle Kombi. Nous continuons de penser qu’il aime son pays, qu’il respecte ses institutions et qu’il reviendra à de meilleurs sentiments. »
Les supporteurs des Lions indomptables, eux, n’en finissent plus de spéculer sur l’identité du sélectionneur que le président de la Fécafoot pourrait nommer. D’après le ministère des sports, la fédération avait soumis les dossiers de candidature et les prétentions salariales de trois entraîneurs avant que Marc Brys soit désigné : ceux du Français Hervé Renard, de l’Italien Fabio Cannavaro et du Portugais José Peseiro. Mais aucun n’a vraiment le bon profil.
Le premier, sous contrat avec la Fédération française de football (FFF) jusqu’au 31 août en tant que sélectionneur de l’équipe de France féminine, n’est pas libre. Fabio Cannavaro et José Peseiro sont toujours disponibles, mais leurs prétentions salariales atteignent 1,5 million d’euros par an, une somme que la Fécafoot, au vu de sa situation financière, aurait beaucoup de difficultés à assumer. Il semble en outre peu probable que les deux techniciens européens souhaitent associer leur nom et leur image à une affaire strictement camerounaise.
« Je ne vois pas quel entraîneur, qu’il soit camerounais ou étranger, pourrait accepter une telle offre et se mettre dans une position très inconfortable qui pourrait nuire à sa réputation, insiste Joseph-Antoine Bell, ancien gardien de but des Lions indomptables, champion d’Afrique en 1984 et 1988. Samuel Eto’o dit qu’il est occupé par les obsèques de son père, ce qui est louable. Quand pourrait-il trouver le temps de chercher un sélectionneur ? Et surtout dans quel but ? Un entraîneur a été nommé, il faut en finir avec cette affaire. »
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Quant à la Fédération internationale de football (FIFA), elle ne s’est pas encore exprimée sur la crise qui secoue le football camerounais. Les partisans de Samuel Eto’o rappellent que le contrat de Marc Brys doit être signé par le président de la Fécafoot pour être validé et enregistré par la FIFA, mais cela ne semble pas vraiment inquiéter Cyrille Tollo : « En 2007 puis en 2012, l’instance, alors présidée par Mohammed Iya, n’avait pas voulu signer les contrats de l’Allemand Otto Pfister et du Camerounais Jean-Paul Akono, mais cela n’avait pas fait obstacle à leur validation. »