Une ligne de feu, vue du ciel, avançant implacablement sur la forêt ; des pompiers impuissants, debout face à un mur de flammes ; des habitants qui malgré l’ampleur des brasiers tentent de les étouffer, de façon artisanale, à coups de seaux d’eau. Les violents incendies qui sévissent au Chili depuis le 1er février, en plein été austral, livrent leur lot d’images apocalyptiques.
La région centre-sud du pays – les provinces de Maule, Nuble, Biobio et Araucanie, à partir de 280 kilomètres au sud de Santiago, la capitale – a ainsi vu des milliers d’hectares totalement détruits. Le bilan, vendredi 10 février : 24 morts, 1 250 habitations disparues, plus de 2 000 personnes prises en charge par les services sanitaires. Au total, plus de 373 000 hectares ont été ravagés. Ce sont les pires incendies après ceux de 2017, lors desquels 467 000 hectares avaient été dévorés par le feu.
Le président (gauche) Gabriel Boric annonçait mercredi des « journées très difficiles », alors que les incendies faisaient déjà rage depuis une semaine. Il en appelait à la collaboration de tous, y compris du secteur privé. « En cinq jours, nous constatons une superficie brûlée équivalente à deux années [normales] d’incendie », évaluait Carolina Toha, ministre de l’intérieur, lundi. Cette semaine, plus de 5 600 pompiers chiliens continuaient de lutter contre les flammes, épaulés par l’aide internationale.
Vingt-huit personnes arrêtées
Celle-ci a afflué depuis différents pays : l’Argentine, le Mexique, mais aussi l’Espagne ou les Etats-Unis, avec l’envoi de moyens matériels ou humains. La France annonçait, mardi, l’envoi de 80 sapeurs-pompiers et sapeurs-sauveteurs. La veille, le président français, Emmanuel Macron, avait assuré sur Twitter : « Le peuple chilien peut compter sur le soutien de la France pour lutter contre ce fléau. » L’Union européenne a également promis une aide : des pompiers, médecins et experts.
« Mais quels que soient le nombre d’avions ou l’argent consacré à lutter contre les incendies, ils sont devenus incontrôlables », constate Roberto Rondanelli, météorologue à l’université du Chili, à Santiago. Vendredi, 321 foyers étaient toujours actifs. Les experts sont formels : l’origine des feux est avant tout humaine, criminelle ou accidentelle. « Il y a une légitime suspicion liée à l’intentionnalité [des feux], qui fait l’objet d’une enquête », a avancé Gabriel Boric, mercredi. Au moins 28 personnes ont été arrêtées.
Cependant, une série de facteurs explique la vitesse et l’intensité des incendies. Le changement climatique d’abord, vecteur d’une mégasécheresse historique au Chili, qui sévit depuis treize ans environ. Elle se traduit par un déficit historique des précipitations, de l’ordre de 30 % entre 2010 et 2019, selon un rapport du Centre de recherche sur le climat et la résilience (CR2) chilien. Ces cinquante dernières années, les températures maximales pendant l’été ont augmenté de 0,43 °C par décennie, souligne le CR2, dans une note publiée le 8 février.
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