Ces dîners « amicaux » de ministres au menu social-démocrate

Le ministre de l’éducation nationale, Pap Ndiaye, et la ministre de la culture, Rima Abdul Malak, à l’hôtel de Matignon, le 27 mai 2022.

Autour de la table de l’hôtel de Rochechouart, huit ministres partagent un dîner amical en ce jour de novembre 2022. Ce soir-là, autour de Pap Ndiaye, le ministre de l’éducation nationale, la petite bande décide de se revoir. Et même d’installer un rituel de dîners mensuels dans les ministères des uns et des autres, unis par leurs « valeurs humanistes » de tenants d’une gauche sociale-démocrate. Tous ces membres du gouvernement Borne depuis juillet 2022 restent inconnus du grand public : Pap Ndiaye (éducation), Olivier Dussopt (travail), Olivier Klein (ville et logement), Clément Beaune (transports), Isabelle Rome (égalité), Rima Abdul Malak (culture), Laurence Boone (Europe) et Roland Lescure (industrie).

Ces tablées aux allures de team building, censées renforcer l’esprit de cohésion au sein d’une équipe gouvernementale décrite comme peu soudée, n’ont rien d’un cabinet fantôme visant à préparer l’après-Macron, ni d’un rassemblement d’ex-socialistes ou de sympathisants du PS, jurent en chœur les participants, peu désireux d’ébruiter ces rendez-vous informels.

A l’origine de ces agapes, Pap Ndiaye espérait trouver conseil et réconfort. Meurtri par les attaques racistes de l’extrême droite, l’universitaire spécialiste des minorités subit encore des critiques acerbes, dans lesquelles ses amis perçoivent l’œuvre d’une « aile droite » de la majorité fidèle à son prédécesseur, l’ex-recteur conservateur Jean-Michel Blanquer. « Je pense représenter quelque chose, par qui je suis, qu’ils détestent », confie-t-il au Monde. Celui qui n’a ni l’envie ni le caractère pour la bagarre politique se félicite d’avoir rétabli une relation de confiance avec le monde enseignant, mais il ne pèse guère pour l’instant au sein du gouvernement.

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Timidité

« Ma manière d’influencer le débat n’est pas le buzz, elle est plus intellectuelle. Je ne vois pas la politique simplement comme des joutes et des rapports de force, mais comme la possibilité de faire avancer des idées progressistes », développe-t-il. Une poignée de députés qui ont fait leurs armes militantes au Parti socialiste (PS) tentent de lui porter secours. « Je l’incite à aller les deux pieds devant, à créer de la polémique sur la mixité sociale, on passerait pour un peu de gauche », s’enflamme Sacha Houlié, élu de la Vienne. Pourquoi ne pas imposer des quotas d’élèves issus de milieux modestes dans les écoles privées ? Au cabinet du ministre, on modère en évoquant des « objectifs cibles » encore en discussion.

Sous Emmanuel Macron, la timidité a longtemps régné à gauche. Avant Pap Ndiaye, la ministre de la santé, Agnès Buzyn, s’était désespérée que le reste à charge zéro, une réforme sociale ayant bénéficié à 10 millions de Français équipés de lunettes, audioprothèses ou soins dentaires, passe sous les radars. Elle avait demandé conseil à Julien Denormandie, à l’époque ministre et confident du chef de l’Etat. « Tu dois intégrer une mesure pas consensuelle. Il faut un truc qui fasse le buzz, pour que les gens s’engagent », lui avait-il répondu.

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