C’est une proposition que Jean-Charles Ahoua n’a pas mis longtemps à accepter. Lorsque le club tanzanien Simba SC, à Dar es-Salaam, lui a proposé un contrat de deux ans et un salaire annuel de 100 000 euros, hors primes, l’attaquant ivoirien de 22 ans a rapidement fait son choix.
« En Côte d’Ivoire, Ahoua devait gagner 600 ou 700 euros par mois au Stella Club d’Adjamé, lequel a récupéré 100 000 euros d’indemnité de transfert. En partant en Tanzanie, il multiplie son salaire par douze. Cela ne se refuse pas », constate l’agent de joueurs Ousmane Samaké. Si une majorité de footballeurs subsahariens privilégient le Maghreb, l’Egypte, l’Europe ou encore l’Asie, ils sont de plus en plus nombreux à s’expatrier dans un autre pays d’Afrique subsaharienne.
Cette tendance, qui s’est accélérée ces trois dernières années, ne surprend pas les acteurs du football continental. « Au Sénégal, la moyenne des salaires est de 200 euros par mois. Alors, les joueurs cherchent à partir, et pas obligatoirement en Europe », explique Mohamed Djibril Wade, le président de la Ligue sénégalaise de football professionnel (LSFP).
Les championnats européens sont moins accessibles qu’avant, car les clubs recrutent davantage entre eux. Et quand ils le font en Afrique, ils se tournent essentiellement vers des centres de formation réputés comme Génération Foot, au Sénégal, ou l’ASEC Mimosas, en Côte d’Ivoire. « La concurrence est de plus en plus forte, il est difficile d’obtenir des visas, et des clubs européens proposent parfois des salaires inférieurs à ceux offerts par des clubs africains », énumère Ousmane Samaké.
Signe de cet exil continental, les effectifs de certains clubs en Tanzanie, au Rwanda, au Kenya ou au Soudan comptent désormais de nombreux joueurs maliens, sénégalais, camerounais, ghanéens ou encore nigérians. Même le championnat zambien commence à attirer des joueurs d’Afrique de l’Ouest.
« Il n’y a que quelques clubs, comme Simba en Tanzanie ou Al-Hilal au Soudan, qui peuvent proposer des salaires allant jusqu’à 20 000 euros par mois », tempère Adolphe Kalisa, le secrétaire général de la Fédération rwandaise de football (FERWAFA). Ces clubs appartiennent le plus souvent à de riches entrepreneurs, capables de dépenser des sommes considérables pour recruter des étrangers.
Compétitions nationales affaiblies
L’exemple du TP Mazembe, en République démocratique du Congo (RDC), est éloquent. Présidé par l’homme d’affaires et opposant Moïse Katumbi, le club basé à Lubumbashi continue d’attirer de nombreux joueurs africains en leur offrant des rémunérations supérieures à celles perçues dans leur pays. Bien que les tensions entre M. Katumbi et les autorités congolaises l’ont obligé à réduire le train de vie de ses joueurs, certains salaires peuvent encore atteindre les 10 000 euros mensuels.
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