Comment le Soudan contourne l’embargo des Nations unies sur les armes

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Fabriquées en Chine, en Russie, en Serbie, en Turquie, aux Emirats arabes unis ou encore au Yémen, des milliers d’armes sont livrées depuis plusieurs années au Soudan, où la guerre civile a fait plusieurs dizaines milliers de morts depuis avril 2023 et a créé l’une des pires crises humanitaires au monde.

Dans un rapport publié le 25 juillet, l’ONG Amnesty International révèle les circuits d’acheminement de ce matériel, en particulier jusqu’au Darfour, en dépit de l’embargo des Nations unies qui pèse en théorie depuis 2004 sur cette région de l’ouest du pays.

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« Des armes et munitions ont été acheminées au Soudan pendant plusieurs années, y compris avant le conflit. Il est clair que certaines de ces armes ont été utilisées au Darfour, violant l’embargo des Nations unies, et que cette pratique se poursuit », explique Abdullahi Hassan, chercheur d’Amnesty International, qui appelle au respect de l’embargo et à son extension à l’ensemble du territoire soudanais. « Cet appel, compte tenu de la violence grandissante dans le pays, est plus urgent que jamais », écrit l’ONG.

Depuis le mois d’avril 2023, une guerre oppose l’armée soudanaise, dirigée par le président, le général Abdel Fattah Abdelrahman Al-Bourhane, aux Forces de soutien rapide (FSR) du vice-président, le général Mohammed Hamdan Daglo, dit « Hemetti ». Le conflit s’enlise tandis que la situation au Soudan a fait quelque 11 millions de déplacés internes.

Deux voies d’acheminement documentées

Selon les chiffres de l’ONG Acled, au moins 16 650 personnes ont été tuées. L’envoyé américain dans le pays, Tom Perriello, évoque, lui, 150 000 morts. Un rapport de Médecins sans frontières (MSF) publié lundi 22 juillet rappelait les conséquences dévastatrices du conflit sur les civils et « l’omniprésence » des violences sexuelles.

Deux voies d’acheminement sont documentées par Amnesty International : d’une part, le détournement d’armes prétendument destinées au commerce « civil », par exemple à des activités de chasse ou de sport. Certaines armes fabriquées par des entreprises notamment turques et russes « échappent largement aux règles de contrôle des exportations et ont été exportées en masse vers le Soudan ces dernières années », est-il expliqué dans le rapport.

D’autre part, la vente d’armes à blanc, qui à l’origine ne permettent pas le tir de projectiles – elles imitent le flash et le son d’une détonation. « Nos experts disent que les types d’armes à blanc importés au Soudan sont des modèles facilement convertibles en armes létales : l’ampleur de ces importations appelle à la vigilance », précise Abdullahi Hassan.

Les circuits d’approvisionnement en armes, véhicules et munitions passent par les frontières libyenne, tchadienne, centrafricaine ou par la ville de Kassala, située dans l’est du Soudan, non loin des frontières érythréenne et éthiopienne. « Les champs de bataille sont éloignés des bases opérationnelles, en particulier de celles des FAS [forces armées soudanaises] qui sont à Port-Soudan et Khartoum. Les FSR sont, elles, principalement basées au Darfour, explique Hager Ali, chercheuse à l’Institut d’études mondiales et régionales (GIGA) à Hambourg. Or, plus les routes sont longues pour s’approvisionner, plus vous êtes vulnérables face au camp adverse. C’est pourquoi il est stratégique pour les deux parties de se lier à différents réseaux qui leur permettent d’obtenir des armes via des pays frontaliers. »

Un aéroport identifié dans l’est du Tchad

Les résultats de l’enquête d’Amnesty International corroborent également ceux d’un rapport de janvier 2024 du groupe d’experts des Nations unies sur le Soudan et d’autres investigations sur le soutien des Emirats arabes unis aux FSR. L’analyse du trafic aérien avait notamment permis d’identifier l’aéroport d’Amdjarass, situé dans l’est du Tchad, comme un point de passage d’armes, de munitions et de matériel médical venus des Emirats vers le Soudan, et en particulier vers le Darfour, région frontalière du Tchad.

Le 19 juin, lors d’une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU, le gouvernement soudanais accusait les Emirats arabes unis de soutenir les FSR en leur fournissant des armes – ce qu’ont nié les autorités émiraties.

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Alors que les tentatives de négociations menées à Djedda (Arabie saoudite) n’ont pas abouti, les Etats-Unis ont annoncé mardi 23 juillet la tenue de nouveaux pourparlers parrainés par Riyad à partir du 14 août, en Suisse, dans l’espoir d’obtenir un cessez-le-feu. Le général Mohammed Hamdan Daglo a confirmé sur le réseau social X la participation des FSR, mais le général Abdel Fattah Abdelrahman Al-Bourhane n’a pas encore répondu à l’invitation.

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