comment un narcotrafiquant britannique a fait plonger ses deux avocats

Il arrive qu’un procès, ou plutôt ce que révèle un procès, se dérobe. Que l’on se noie dans le flot des mots entendus et que la transcription d’une audience dans l’urgence laisse une impression d’incomplétude. L’affaire jugée récemment devant le tribunal correctionnel de Paris, dans laquelle deux avocats pénalistes, Mes Joseph Cohen-Sabban et Xavier Nogueras, ont comparu aux côtés de leur ancien client, le narcotrafiquant Robert Dawes, pour « escroquerie » et « complicité d’escroquerie au jugement », et dont le jugement est attendu le 18 avril, est de celles pour lesquelles la décantation s’impose. Comme un thriller que l’on reprendrait à sa première page.

En 2013, 1 300 kilos de cocaïne sont saisis à l’aéroport de Roissy. La pêche miraculeuse est le fruit de renseignements en provenance d’Amérique latine, exploités par les polices européennes, et surtout de la coopération d’un trafiquant français, Sofiane Hambli, avec le patron de l’Office central pour la répression du trafic illicite de stupéfiants, François Thierry, dont il est devenu l’indicateur privilégié. Un an plus tard, un Britannique d’une quarantaine d’années, Robert Dawes, soupçonné d’être le commanditaire de la livraison de cocaïne, est interpellé en Espagne.

Lire notre enquête : Article réservé à nos abonnés Les méthodes des « stups » dans le viseur de la justice

Cet homme, originaire de Nottingham, extradé et incarcéré en France en novembre 2015, est considéré comme l’un des acteurs majeurs de l’importation de drogue en Europe, depuis l’Afrique ou l’Amérique du Sud, sous le couvert d’activités d’import-export légales, qui ouvrent à sa marchandise l’accès aux entrées et sorties aéroportuaires et maritimes de nombreux pays. Selon un rapport de la Serious Organised Crime Agency (SOCA), l’équivalent britannique du FBI, son implication dans le trafic de cocaïne et d’héroïne a commencé en Grande-Bretagne dès le milieu des années 1990. Une première affaire fait tomber son frère et son père, respectivement condamnés à vingt-six et huit ans de prison, mais Robert Dawes, lui, a pris la tangente et s’est installé dans le sud de l’Espagne où, d’après le renseignement britannique, il a poursuivi ses activités de trafiquant.

Mis en cause en 2008 dans la saisie de 200 kilos de cocaïne à Madrid – une accusation dont il sera finalement blanchi –, il s’est exilé quelques années à Dubaï, avant de réapparaître sur la Costa del Sol. Traqué par toutes les polices européennes depuis des années, Robert Dawes était parvenu jusque-là à leur échapper. Son casier judiciaire comporte dix-huit mentions, mais uniquement pour des faits de vol et de violences : les premiers datent de 1983 (il a alors… 11 ans), les derniers de 2004 (il en a 22). Il est marié, vit toujours avec la même femme et est père de trois enfants.

Il vous reste 88.58% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Source