
La Banque mondiale va bientôt changer de dirigeant. Son président, David Malpass, a annoncé, mercredi 15 février, qu’il démissionnerait d’ici au 30 juin, soit près d’un an avant la fin de son mandat de cinq ans, sans donner de raison précise. Placé à ce poste par l’ancien président des Etats-Unis Donald Trump en avril 2019, l’américain de 66 ans était critiqué pour son manque de volontarisme dans la lutte contre le changement climatique.
Il était aussi sous pression des pays actionnaires pour réformer la plus grande banque multilatérale de développement au monde. Six jours à peine avant l’annonce de cette démission, jeudi 9 février, la secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, avait appelé l’institution sise à Washington à dégager « rapidement » des ressources pour aider les pays en développement à faire face aux crises, notamment sanitaire et climatique.
Alors que les besoins en financement liés à l’adaptation au réchauffement de la planète augmentent et que de nombreux pays riches sont sortis endettés de la crise du Covid-19, plusieurs actionnaires de la Banque mondiale souhaitent que l’institution renforce ses capacités de financement en s’adossant au secteur privé. Un rapport, commandé par les pays du G20 et publié en octobre 2022, avait avancé plusieurs pistes de réformes.
« Pas de vision claire » de l’articulation développement-climat
L’une d’elles consistait à augmenter les montants de « capital exigible » par les pays actionnaires, à savoir un capital disponible en cas de besoin mais non mobilisé, ce qui permet à la Banque de lever davantage de fonds sur les marchés sans risquer de voir sa note dégradée auprès des agences de notation. Autre recommandation : la cession de certains prêts au secteur privé, afin d’alléger son bilan et retrouver de la marge de manœuvre dans ses financements.
« Mais la Banque mondiale était réticente à engager certaines de ces réformes », affirme Clemence Landers, chercheuse au Center for Global Development, un groupe de réflexion basé à Washington. David Malpass avait surtout de la peine à convaincre de la sincérité de son combat contre le changement climatique.
Interrogé à trois reprises sur le rôle des énergies fossiles dans le réchauffement de la planète lors d’une table ronde organisée par le New York Times en octobre 2022, l’ancien sous-secrétaire au Trésor de Donald Trump chargé des affaires internationales avait refusé de prendre position, en répondant qu’il n’était lui-même « pas un scientifique ».
Même s’il a ensuite démenti être un « climatosceptique » et mis en avant les 31,7 milliards de dollars (29,6 milliards d’euros) de financements climatiques en 2022, soit 36 % des prêts de l’institution, les ONG l’accusent de continuer à financer des projets utilisant du gaz naturel. « Il n’a pas réussi à formuler une vision claire du rôle de la Banque mondiale en matière de développement et de lutte contre le changement climatique, et surtout à articuler les deux sujets sans les opposer », estime Clemence Landers.
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