Elisabeth Borne s’accorde avec la droite sur les 43 ans de cotisation pour les carrières longues quand l’âge requis est atteint

Dans une nouvelle concession à la droite, la première ministre, Elisabeth Borne, a annoncé, mardi 14 février, que les salariés du dispositif des carrières longues, c’est-à-dire qui ont commencé à travailler avant 21 ans, n’auront pas à cotiser plus de quarante-trois ans pour partir à la retraite dès lors qu’ils auront atteint l’âge de départ anticipé requis.

« Dès lors qu’est atteint l’âge de départ anticipé, la réforme ne prévoit pas, pour les carrières longues, de durée de cotisation supérieure à quarante-trois ans », a affirmé Elisabeth Borne lors de la séance des questions au gouvernement, en réponse à la députée Les Républicains (LR) Véronique Louwagie.

Dans le projet initial, certains salariés en carrière longue devaient cotiser quarante-quatre ans, notamment ceux qui ont commencé à travailler entre 16 et 18 ans. Ce « principe » de cotisation pendant quarante-trois ans au maximum sera inscrit dans un amendement gouvernemental déposé mardi qui étendait déjà le dispositif des carrières longues à ceux qui ont commencé à travailler entre 20 et 21 ans. Ce dernier point avait déjà fait l’objet d’une première évolution en réponse aux demandes de LR.

Nées en 2003 d’un compromis entre la CFDT et la droite, alors au pouvoir, les carrières longues sont de nouveau, deux décennies plus tard, la clé d’une réforme des retraites. Cette fois-ci entre le pouvoir et la droite, dont les voix seront cruciales pour obtenir un vote au Parlement. Les Républicains l’ont encore affirmé mardi dans un communiqué : « Nous souhaitons soutenir une réforme du système de retraite », à condition notamment d’une « meilleure prise en compte de la spécificité des carrières longues » afin que ceux qui en bénéficient « partent après quarante-trois annuités ».

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Sceller un accord politique

Une demande entendue par l’exécutif, de nature à sceller un accord politique, faute d’entente avec des syndicats opposés au recul de l’âge légal de départ de 62 ans à 64 ans. Dans son projet de réforme, le gouvernement s’était engagé à ce que « personne ne soit obligé de travailler plus de quarante-quatre ans ». Désormais, aucun salarié en « carrière longue » ne sera obligé de cotiser plus de quarante-trois ans dès lors que deux autres conditions seront remplies : avoir atteint l’âge de départ anticipé requis et « avoir travaillé quatre ou cinq trimestres avant un certain âge », a précisé Elisabeth Borne.

Les changements prévus sur les carrières longues « sont des mesurettes », a estimé le numéro un de Force ouvrière, Frédéric Souillot, dimanche sur BFM-TV. L’idée est pourtant de conforter ce dispositif, qui permet à ceux entrés tôt dans la carrière d’en sortir avant les autres. Les conditions du départ anticipé ont été tantôt restreintes, pour faire des économies après la crise financière de 2008, tantôt assouplies après le retour de la gauche aux affaires en 2012.

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Le nombre de bénéficiaires a ainsi varié d’un peu plus de 100 000 par an, au départ, à moins de 25 000, en 2009, avant de remonter en flèche à plus de 170 000, en 2015, puis de décroître jusqu’à 125 000, en 2021. Soit tout de même encore près d’un départ en retraite sur cinq. La quasi-totalité des bénéficiaières font valoir leurs droits deux ans avant l’âge légal, donc à 60 ans. Pour cela, il faut avoir commencé avant 20 ans et avoir cotisé cinq trimestres avant la fin de l’année de son 20e anniversaire.

Par exemple, pour une personne née en 1963 (qui aurait 60 ans cette année), avant le 31 décembre 1983. Pour ceux nés en fin d’année (d’octobre à décembre), quatre trimestres suffisent. Les mêmes règles s’appliquent pour un départ à 58 ans, à condition d’avoir commencé avant 16 ans, ce qui ne concerne que quelques centaines de personnes par an. Mais arrivé à l’âge fatidique, il faut aussi justifier d’une carrière complète. Soit au moins quarante-deux années de cotisation (168 trimestres) pour partir à 60 ans en 2023, et même quarante-quatre années (176 trimestres) pour s’en aller à 58 ans. Une durée qui peut inclure des périodes validées au titre de la maternité, de la maladie ou du chômage, entre autres.

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La cheffe du gouvernement a par ailleurs estimé qu’il n’était « pas encore trop tard » pour que les amendements de « blocage » de la gauche sur le projet de réforme des retraites soient retirés alors qu’il reste environ 14 000 amendements à examiner d’ici à vendredi soir sur ce texte.

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Le Monde avec AFP

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