En Afrique francophone, le tournant antidémocratique

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Sidérés, les diplomates occidentaux n’ont pu qu’assister impuissants aux putschs en série qui ont eu lieu en Afrique francophone ces quatre dernières années. Mali en 2020 et 2021, Guinée en 2021, Burkina Faso par deux fois en 2022 puis Niger et Gabon en 2023 : leur récurrence est le signe le plus visible de la fin d’un cycle politique dans un espace géographique lié par la colonisation française.

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Le reflux du mouvement démocratique commencé dans les années 1990 avec l’organisation des « conférences nationales », qui avaient ouvert la voie au multipartisme, est aussi soudain qu’impensé. En 2015, le putsch mené par le général Gilbert Diendéré à Ouagadougou n’avait-il pas été surnommé par les Burkinabés « le coup d’Etat le plus bête du monde » tant l’accession au sommet de l’Etat par les armes semblait vouée à l’échec ?

Sept jours après sa tentative, sous la pression combinée de la société civile burkinabée et de la communauté internationale, l’ancien chef d’état-major du président Blaise Compaoré (1987-2014) n’avait eu d’autre choix que de renoncer au pouvoir (il est depuis incarcéré). Beaucoup proclamaient alors que cet épisode était la preuve qu’en Afrique l’ère des coups d’Etat était révolue.

Aujourd’hui, ni les sanctions internationales ni les médiations régionales n’ont d’effet sur les putschistes. Les « hommes forts » ont tous adopté rapidement des mesures autoritaires, en vue d’asseoir ce qu’ils ont arraché par les armes. Concentration des pouvoirs dans les mains du président autoproclamé, suspension des textes législatifs fondamentaux, restriction des libertés d’expression et de la presse, mise au pas de l’opposition, et reports incessants du projet d’organisation d’élections. La nouvelle charte de la transition burkinabée, adoptée samedi 25 mai, a entériné à la va-vite la prolongation du régime pour cinq années supplémentaires. Mi-mai, ce sont les Maliens qui ont prolongé leur transition de « deux à cinq ans » après un prétendu « dialogue national ».

Préserver les apparences

Ces militaires ne sont que les visages les plus visibles de la crise antidémocratique dans laquelle se trouve l’Afrique francophone. De nombreux présidents en exercice ont réduit la libre expression politique à des faux-semblants.

Au Tchad, Mahamat Idriss Déby vient de légitimer par les urnes son accession dynastique à la tête de l’Etat après la mort, en 2021, de son père, Idriss Déby, en remportant une présidentielle contestée. Au Togo, Faure Essozimna Gnassingbé, président depuis dix-neuf ans, a modifié la Constitution pour pouvoir se maintenir indéfiniment au pouvoir, comme l’avait fait son père avant lui.

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