Dans un paysage de savane et d’herbes hautes parsemé de quelques acacias aux formes de parasols, une masse sombre se détache de l’immensité. « Ce sont des gnous !, s’exclame Julieth Jones, guide et chauffeuse, un bras accoudé à la fenêtre de la Jeep, l’autre tenant ses jumelles. Ils trouvent ici un pâturage plus nutritif, car il a plu. » Facilement reconnaissables à leur barbe blanche et à leur arrière-train légèrement incliné, ces herbivores broutent, l’air aux aguets, prêts à déguerpir au moindre bruit. Dans cette zone protégée d’Ikorongo, à l’orée du parc du Serengeti, dans le nord de la Tanzanie, les ornières emplies d’eau en pleine saison sèche (de juin à novembre) témoignent d’une ondée récente. « Normalement, à cette saison, on devrait plutôt trouver les gnous au nord du Serengeti et autour de la réserve de Masai-Mara au Kenya, explique Gadiel Tanapa, l’écologue du parc. Le changement du régime des précipitations affecte leur comportement. »
Tout au long de l’année, ces gnous accompagnés de zèbres, de gazelles de Thomson et d’élands parcourent par milliers les plaines du Serengeti avant de remonter vers le Masai-Mara, au nord (Kenya), dans ce qui constitue l’une des plus grandes migrations terrestres au monde. Un rituel qui s’effectue dans le sens des aiguilles d’une montre, guidé par la quête d’eau et de nourriture, mais que le dérèglement climatique altère. « L’écosystème a connu de graves sécheresses récurrentes, des pluies irrégulières et plus intenses et une augmentation de la température de 4,8 à 5,8 °C sur six décennies », relève une étude publiée en octobre dans la revue scientifique Plos Climate.
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