En Turquie, avec la Sécurité civile française envoyée sur les lieux du séisme : « La seule question qui importe, c’est : aurais-je pu faire plus ? »

Chaque heure compte. Chaque quart d’heure. Chaque minute peut-être. Le sablier s’écoule, cruel et implacable ; les familles de disparus sous les décombres supplient : Non ! N’arrêtez pas les recherches ! Il y a encore une chance ! On ne doit pas les abandonner ! Si vous partez, vous les condamnez ! Les scènes se multiplient devant les immeubles défoncés et dans le froid glacial, des familles turques écrasées de fatigue et d’angoisse, laissent couler leurs larmes. Cinq jours depuis le séisme. On a désormais dépassé la limite de survie potentielle dans un froid glacial. Mais le premier détachement de la Sécurité civile française envoyé en Turquie vingt-quatre heures après le séisme s’acharne, fouille, déblaie, espère. Avec une foi troublante.

La décision de quitter la ville d’Osmaniye, dans le sud-est de la Turquie, où il avait été affecté dans un premier temps, a été prise rapidement par le lieutenant-colonel Jean-Philippe Nicot, quelques heures seulement après l’installation du camp. Mieux valait se déployer très vite à Antakya, dans la province du Hatay, beaucoup plus atteinte par le séisme, très peu aidée dans les premières heures. Si des vies pouvaient encore être sauvées, l’urgence était dans cette ville aux rues, aux écoles, aux magasins, aux lieux de culte dévastés. Mais on ne quitte pas ainsi un site d’affectation. Il fallait négocier avec les autorités locales, contrariées, consulter les représentants du centre de crise du Quai d’Orsay et, bien sûr, l’ambassade de France à Ankara, elle-même en tractations avec les autorités turques, ainsi que le centre de coordination des secours basé à Antakya, placé sous l’égide de l’ONU.

Le chaos sur l’autoroute

Donner le feu vert a pris des heures précieuses, peut-être cruciales. Il fallait trouver un camion pour transporter le matériel, des bus pour convoyer les équipes, de l’essence et du gazole, de plus en plus rares. Le camp a été démonté à une vitesse record, mais on annonçait quelques embouteillages sur la route menant à Antakya. Une voiture de police allait heureusement ouvrir la voie. Vite. C’était une mission de sauvetage.

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Las ! Personne n’avait imaginé le chaos rencontré sur l’autoroute, les files de voitures, de bus, de camions roulant au pas, dans les deux sens, doublés sur la voie d’urgence par des dizaines d’ambulances, sirènes hurlantes. « Les gens fuient la ville, explique notre traducteur. Ils ont peur des répliques et ils ont tout perdu, ils partent dans leur famille éparpillée dans toute la Turquie, à Ankara ou à Istanbul, puisque Turkish Airlines a annoncé des billets d’avion quasi gratuits jusqu’au 13 février. Les vacances scolaires ont été prolongées. » Mais tous ces véhicules roulant vers Antakya ? « Des gens qui veulent venir en aide. De la famille, des amis, des associations, des syndicats, scandalisés par la défaillance du gouvernement. Des camions bourrés de vivres, de vêtements, de matériel d’hygiène. Antakya est comme une zone de guerre, tous les édifices sont effondrés ou vont l’être. Les gens qui y restent vivent dans les rues. »

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