enquête au cœur d’un colonialisme vert

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Livre. Poursuivant le travail entrepris avec L’Invention du colonialisme vert (Flammarion, 2020), Guillaume Blanc revient sur la manière dont s’est façonnée la politique de protection de l’environnement en Afrique au tournant des indépendances, des années 1950 aux années 1970, dans La Nature des hommes. Une mission écologique pour « sauver » l’Afrique (La Découverte, 334 pages, 22 euros).

L’occasion également d’« étudier le passage du temps des colonies au temps des postcolonies », afin de voir comment la construction de nations nouvellement indépendantes a quelque peu rebattu les cartes, amenant les acteurs de cette singulière période historique à se positionner pour un nouvel exercice du pouvoir. L’objectif de l’historien est ainsi double : montrer que la mise en place de la politique de préservation de la nature en Afrique correspond « à l’avènement d’une coproduction de la nature africaine », qui atteste qu’en « postcolonie » le passé colonial pèse toujours sur le présent.

Guillaume Blanc décrit dans le détail les relations qu’entretiennent quatre groupes identifiés d’acteurs. Le premier est composé d’« experts gentlemen » qui mènent la danse depuis l’Europe ou l’Amérique du Nord ; le second, d’ex-agents coloniaux devenus « experts internationaux » sur le terrain. Ces deux catégories partagent peu ou prou la même vision de la nature africaine comme étant luxuriante mais menacée par les Africains.

Economie extractive

Or, constate le chercheur, « leur raisonnement oublie l’essentiel : si [l]es forêts sont massivement défrichées, c’est d’abord pour mettre la terre en culture au service de l’économie européenne ». Une économie extractive qui industrialise les exportations de bois, de caoutchouc et de minerais. Paradoxe, ce sont ceux-là mêmes qui détruisent – les Occidentaux – qui veulent protéger pour pouvoir continuer à exploiter les ressources naturelles africaines.

Troisième groupe d’acteurs à officier : les dirigeants africains, dont la participation est « autant subie que choisie », car elle permet parfois d’étendre l’autorité d’un nouveau pouvoir central à des zones où l’opposition est importante. Enfin, quatrième groupe : les habitants qui se trouvent chassés de leurs terres ancestrales pour la création d’aires protégées et condamnés à voir leurs pratiques criminalisées. La chasse traditionnelle est, de fait, considérée comme du braconnage, alors que la « chasse sportive » est autorisée pour les Occidentaux. Une telle situation ne peut être qu’explosive.

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