la Biennale de Dakar, rendez-vous majeur de l’art contemporain africain, reportée de six mois

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Les allées de l’ancien palais de justice de Dakar sont vides, dépourvues des œuvres qui devaient être exposées dans ce lieu emblématique de la capitale sénégalaise, à moins de deux semaines de la date initiale de lancement de la 15édition de la Biennale d’art contemporain africain, Dak’Art.

Le 24 avril, par un communiqué du ministère de la culture du Sénégal, l’un des rendez-vous majeurs de l’art contemporain continental a été reporté du 16 mai au 7 novembre. Un coup dur pour les acteurs de ce secteur alors que Dak’Art, qui existe depuis 1996, s’est toujours tenue à la date prévue, à l’exception de l’édition de 2020, lors de l’épidémie du Covid-19. Cinquante-huit artistes africains et des diasporas étaient invités cette année.

« Le contexte national, marqué par la tenue de la dernière élection présidentielle [le 24 mars], a fortement impacté le processus de préparation de ce rendez-vous consacré aux arts visuels. Mais le contexte international a aussi joué, avec notamment des difficultés pour transporter les œuvres passant par le golfe d’Aden et la mer Rouge [où les houthistes multiplient les attaques contre les navires au large du Yémen] », explique Marième Ba, la secrétaire générale de Dak’Art, qui dit ne pouvoir chiffrer le coût financier de ce changement de date.

Alors que les rumeurs d’un report courraient depuis plusieurs semaines, beaucoup d’acteurs culturels critiquent une annonce considérée comme trop tardive, à seulement trois semaines de l’événement. « Nous avons dû attendre que le nouveau président soit investi, que le gouvernement soit nommé et que le nouveau ministre de la culture soit installé pour que la décision soit prise », se justifie une source au sein du comité d’orientation et d’organisation de la Biennale qui renvoie la responsabilité à l’équipe gouvernementale précédente, celle de l’ancien président Macky Sall.

#TheOFFisON

« L’ex-gouvernement n’a pas respecté ses engagements financiers, la Biennale s’est retrouvée sans ressources », continue la même source. Selon la source du comité d’organisation, seul le premier tiers du budget d’environ un milliard de francs CFA (quelque 1,5 million d’euros) de Dak’Art avait été versé en janvier, alors que l’Etat en est le contributeur majoritaire.

Certains acteurs pointent aussi du doigt des dysfonctionnements interne. « Le secrétariat général n’a pas bien fait son travail, à nous de nous unir pour pointer du doigt les défaillances. Il faut se battre pour changer l’équipe administrative qui a failli », estime Pascal Nampémala Traoré, artiste ivoirien installé à Dakar, qui avait prévu de présenter un événement artistique en marge de la Biennale 2024.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés A Dakar, une biennale sans concessions

Pour les galeristes, ce changement de calendrier a des conséquences directes. « Je suis obligée de décaler la programmation à novembre, mais cela aura un gros impact financier car j’avais déjà payé les billets d’avion, les logements des artistes et la location du lieu d’exposition. Autant de frais qui ne seront pas remboursés », regrette Aude Minart, directrice de la Galerie africaine basée à Paris.

Les acteurs du secteur se sont spontanément fédérés sur les réseaux sociaux derrière le hashtag #TheOFFisON pour inciter au maintien du « off », comme on appelle la myriade d’événements privés organisés par les galeries et les centres culturels de Dakar en marge de la programmation officielle. Ils œuvrent pour communiquer sur les initiatives maintenues et proposer en ligne des programmations. Une initiative qui n’a pas plu au comité organisateur de Dak’Art.

Quelque 500 événements du « off » seraient maintenus

Dans un communiqué daté du 30 avril, il a prévenu que « la charte graphique du “off” est exclusivement liée au “in” de la Biennale des arts de Dakar. Toute utilisation totale comme partielle de ces éléments en dehors du cadre de la 15Biennale de Dakar est interdite et passible de poursuites ». « Le secrétariat général n’a pas le pouvoir d’interdire des manifestations culturelles. Je vais maintenir mon exposition que je programme depuis un an, et pour laquelle j’ai fait venir des œuvres depuis le Burkina Faso », réagit Joëlle Le Busy de la galerie dakaroise Arte, qui n’a changé que la signalétique et la communication autour de son événement.

Elle est loin d’être la seule à avoir décidé de maintenir son programme en mai, malgré l’annulation officielle. Une source indique qu’environ trois quarts des quelque 500 événements prévus pour le « off » seraient maintenus. Parmi eux, le centre d’art Raw Material, qui maintient le vernissage de son exposition le 19 mai. « Notre public local et sous-régional attend ce rendez-vous. Nous ne pouvons pas nous permettre de tout annuler », renchérit Fatima Bintou Rassoul Sy, directrice des programmes de ce centre, pour qui le mouvement #TheOFFisON « n’est en aucun cas un moyen de concurrencer ou de remplacer la Biennale ».

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Reste à savoir si, dans six mois, le public sera aussi nombreux à Dakar, alors que s’ouvriront quasiment au même moment Les Rencontres de Bamako, Biennale africaine de la photographie, du 16 novembre au 15 janvier.

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