La France insoumise au défi de dépasser sa culture de l’outrance

Le député de La France insoumise Louis Boyard (en haut à droite) et d’autres députés du parti manifestent leur désapprobation lors d’une journée de débat sur la réforme des retraites à l’Assemblée nationale, le 14 février 2023.

Thomas Portes foulant un ballon à l’effigie d’Olivier Dussopt, écharpe tricolore en bandoulière et immortalisé dans une photo publiée sur Twitter ; puis Aurélien Saintoul qualifiant le même ministre du travail de « félon » et d’« assassin » à l’Assemblée nationale, lundi 13 février : les députés de La France insoumise (LFI) se retrouvent chaque semaine au cœur de nouveaux incidents à l’occasion des débats sur la réforme des retraites.

Des suites différentes, mais à chaque fois un même emballement, des sanctions et une monopolisation du temps parlementaire. Thomas Portes, élu de Seine-Saint-Denis, n’a pas retiré son tweet polémique, ses collègues « insoumis » ont fait front derrière lui après qu’il a été condamné de la plus forte sanction possible – une exclusion de quinze jours, comme celle prononcée à l’encontre du député de Gironde du Rassemblement national (RN) Grégoire de Fournas, en novembre 2022, après une injure raciste –, décidée par le bureau de l’Assemblée nationale.

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Aurélien Saintoul, élu des Hauts-de-Seine, est apparu au pupitre, blême, une vingtaine de minutes après son intervention pour présenter de plates excuses à Olivier Dussopt. A l’inverse de son collègue du Val-de-Marne, M. Saintoul a reçu un rappel à l’ordre avec inscription au procès-verbal, le retrait d’un quart de son indemnité pendant un mois. Presque une faveur accordée par le président de séance, Sébastien Chenu, député du RN.

Tout un symbole dans cet Hémicycle où la gauche concentre désormais les accusations de « bordélisation ». Le mot du ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, est repris en chœur par les députés de la majorité. Face à eux, le RN devient presque l’arbitre des outrances des uns et des autres. Après le ballon et l’« assassin », le député MoDem du Haut-Rhin Bruno Fuchs a dressé un parallèle entre les discours des députés de LFI et la mémoire de Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie décapité par un terroriste islamiste en 2020.

« Nouvelle génération »

Au sein de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), on commence à s’agacer, même si la solidarité a primé jusque-là. Chaque séquence représente du temps perdu sur le débat des articles et une prise de risque non négligeable pour l’alliance de gauche : perdre un député pour quinze jours n’est pas anodin quand les votes sur les articles se jouent à quelques voix près.

Pour Marine Tondelier, numéro un des écologistes, « avec ces dérapages, on offre aux macronistes autant d’occasions de faire diversion, on n’a pas besoin de s’en prendre personnellement à un ministre, on a largement de quoi faire avec le fond de la réforme ». Côté socialiste, Nicolas Mayer-Rossignol, qui reproche au premier secrétaire du Parti socialiste (PS), Olivier Faure, son alliance avec les « insoumis », reprend de la vigueur dans ses critiques de LFI. « Pas ma gauche. Les excuses ne suffiront pas », a écrit le maire de Rouen dans la foulée de l’intervention de M. Saintoul.

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