
Passée à la postérité, la photo fait partie des preuves qui l’ont accablé. Costume noir et chemise blanche, Arne Treholt marche dans une rue de Vienne, l’été 1983, accompagné de deux agents du KGB, dont le général Gennadij Titov, expulsé de Norvège en 1977 en raison d’une affaire d’espionnage. En grande discussion, les trois hommes semblent rire à gorge déployée. On est alors en pleine guerre froide. Arne Treholt rentre des Etats-Unis, où il a officié pendant trois ans comme conseiller auprès de l’ambassadeur de Norvège aux Nations unies. Il vient d’être nommé à la tête du service de communication au ministère des affaires étrangères, à Oslo.
Six mois plus tard, en janvier 1984, son arrestation va plonger le pays dans la consternation. Sa condamnation à vingt ans de prison pour espionnage, en 1985, restera « une cicatrice dans l’histoire norvégienne d’après-guerre », selon le quotidien Aftenposten, qui a annoncé, dimanche 12 février, la mort à Moscou de l’espion le plus célèbre du royaume scandinave.
Jusqu’au bout, Arne Treholt a affirmé qu’il avait voulu bâtir des ponts entre l’Est et l’Ouest, sans jamais fournir à ses contacts la moindre information qui aurait pu mettre en danger la sécurité de son pays. Il a pourtant été grassement payé par le KGB, mais aussi par les services secrets irakiens, avec lesquels il était entré en contact à New York.
Rencontre avec des agents du KGB
La nouvelle de son arrestation, l’été 1984, a provoqué une onde de choc dans les hautes sphères de la société norvégienne. Car Arne Treholt connaissait tout le monde, ou presque. Son père, Thorstein Treholt, figure du Parti travailliste, a été ministre de l’agriculture au début des années 1970. Lui-même s’est encarté en 1964.
Journaliste au service étranger du quotidien de gauche Arbeiderbladet, il se lie d’amitié avec l’avocat Jens Evensen, qui, devenu ministre du commerce et des affaires maritimes en 1973, fait de lui son secrétaire politique, puis son secrétaire d’Etat. A l’époque, la Norvège a engagé avec l’URSS des négociations sur la « zone grise » que se disputent les deux pays en mer de Barents. Un accord sur la pêche sera finalement signé en 1978.
Depuis dix ans déjà, Arne Treholt rencontre régulièrement des agents du KGB à Oslo. Quand l’ancien journaliste est nommé à New York en 1979, les services du renseignement norvégien, déjà soupçonneux, contactent le FBI. Deux agents secrets américains s’installent près de chez lui. Se faisant passer pour ses voisins, ils le surveillent.
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