Le camp Butmir, à Sarajevo, est souvent un point oublié sur les cartes des bases militaires en Europe. Dans cette enclave grillagée, installée en bordure d’aéroport après les accords de Dayton, qui il y a vingt-sept ans ont mis fin aux combats interethniques en Bosnie-Herzégovine, on travaille pourtant toujours à contenir à bas bruit les braises mal éteintes de la guerre (1992-1995). D’autant que le conflit ukrainien a ravivé les brandons des clivages entre communautés. Aussi, en cette fin janvier, l’épais manteau de neige qui recouvre la ville donne-t-il aux allées et venues des soldats de faux airs apaisés.
De 900 à 1 000 militaires américains et européens, issus de vingt pays différents, s’affairent au camp Butmir. De sobres baraquements sont installés autour d’allées baptisées du nom des principales villes de Bosnie-Herzégovine. Des véhicules sont soigneusement alignés sur de vastes parkings attenants. On trouve là autant de camions tout-terrain que de blindés légers de type Humvee ou encore des véhicules de transport de troupes de type TAB ou Piranha et quelques hélicoptères de manœuvre et d’assaut.
Au lendemain de la guerre en 1995, le camp Butmir était le siège de la force de stabilisation de l’OTAN (SFOR) qui a compté jusqu’à 60 000 hommes. En 2004, l’acronyme a changé, la SFOR est devenue Eufor Althea. L’Union européenne (UE) en a repris le pilotage. Les effectifs qui étaient encore de 7 000 hommes ont progressivement été réduits. Mais depuis 2019, la base ne cesse de reprendre discrètement de l’épaisseur.
Travail de « sécurisation »
La principale hausse d’effectifs est survenue juste après le déclenchement de la guerre en Ukraine, fin février 2022, avec 500 hommes supplémentaires venus d’Autriche, de Roumanie, de Bulgarie et de Slovénie. Ces derniers mois, l’Allemagne et les Pays-Bas ont aussi décidé de rejoindre l’Eufor : les troupes allemandes sont arrivées en septembre, les Néerlandais en janvier. Un bataillon multinational composé de 500 hommes, dont des Turcs, des Autrichiens, des Bulgares, des Roumains ou encore des Macédoniens du Nord s’entraîne régulièrement pour se tenir prêt à s’interposer face à d’éventuelles tensions.
Ces chiffres sont « insuffisants », notait un rapport du think tank European Council on Foreign Relations (ECFR) en septembre, mais alors que « ces dernières années la fermeture du bureau du Haut représentant et de l’Eufor semblait imminente, la situation actuelle montre que les pays occidentaux ont conscience de la fragilité de la paix en Bosnie », relevait aussi l’ECFR.
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