
« Vous n’allez pas me juger à pile ou face ?! » Face aux jurés de la cour d’assises des Bouches-du-Rhône, accusé d’être le commanditaire d’un règlement de comptes commis en 2016 à Marseille, Kamel Meziani s’est montré, une semaine durant, fin stratège pour tenter de décrocher « un acquittement qui s’impose ». Mais c’est finalement à trente ans de réclusion criminelle que les jurés ont condamné, vendredi 10 février, cet homme de 38 ans qui est aux yeux de la police judiciaire l’un des principaux « patrons » du narcobanditisme marseillais. Il a été reconnu coupable de complicité de meurtres et de tentative de meurtre en bande organisée par instruction, aide et assistance.
Le 21 octobre 2016, sur le parking d’un fast-food, deux hommes sur un scooter assassinent deux des trois occupants d’un véhicule, le passager avant parvenant à sauver sa peau et à détaler sous le feu nourri d’un des assaillants. Très vite, l’enquête établit que la fusillade est en lien avec une bagarre qui, deux jours plus tôt, a opposé les gérants en place et les prétendants à la reprise d’un point de vente de stupéfiants implanté cité Méditerranée. Un petit plan stups des quartiers Nord, « succursale » du puissant réseau voisin des Oliviers A.
Sofiane Tatoui, identifié par son ADN sur une cagoule abandonnée sur le lieu d’incendie du scooter, a été condamné, en janvier 2021, à vingt-huit ans de réclusion criminelle – il attend d’être jugé en appel – et Boualem Mekboul, à trente ans avec une mesure de sûreté de vingt années, alors qu’il est en fuite. Cette dernière peine avait aussi été prononcée contre Kamel Meziani, en son absence aussi, celui-ci ayant pris la poudre d’escampette, en juillet 2020, libéré à la faveur d’une erreur de procédure, deux jours avant d’être condamné dans une autre affaire : la direction du réseau des Oliviers A, un des plus juteux de la cité phocéenne.
Ayant fait opposition à ce premier verdict, Kamel Meziani était rejugé cette semaine, après avoir été de nouveau arrêté en août 2021. L’occasion d’être confronté à son principal accusateur, un témoin sous X aux airs de fantôme.
« Source sûre »
Sur les écrans de la cour d’assises qui affichent l’image d’un store, la voix archi-brouillée, « X numéro 2016/04 » comme l’appelle le président Jean-Yves Martorano, évoque sa « source sûre », « un jeune fréquentant les réseaux des quartiers Nord » ayant reçu les confidences d’un des assassins qui « se serait épanché ». « D’après ce qu’on m’a raconté », Sofiane Tatoui et Boualem Mekboul, les deux gérants malmenés de la cité Méditerranée, « sont allés voir le dernier “grand” encore en place des Oliviers A, le dénommé “Souris”, qui leur a donné l’autorisation de faire le travail. Il a fourni les armes et les moyens de transport. Je pense que Souris s’est occupé du tracker à mettre sur la voiture » des victimes.
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