l’engouement des jeunes filles pour la glisse urbaine

Au skatepark Espace Glisse Paris 18 (EGP18), où l’association Realaxe donne des cours, en mai 2022.

Maud enfile sa tenue de skate, casque et protections. Sur le béton, des jeunes skateuses la saluent d’un « check » du poing et s’encouragent d’un « On est là pour toi ! » lorsque l’une d’elles fonce dans la pente d’un « snake bowl », une cuvette profonde et incurvée. A 27 ans, cette doctorante en sociologie s’est mise au skate pendant le premier confinement et fréquente assidûment le vaste skatepark couvert installé en lisière du 18ᵉ arrondissement de Paris, qui fait partie, cela ne s’invente pas, du complexe sportif des Fillettes. C’est là qu’a lieu chaque mardi un cours de skate féminin, donné par une association, Realaxe.

Si la moyenne d’âge dans l’association se situe entre 25 et 30 ans, de jeunes pratiquantes comme Thelma et Jeanne, 14 ans, s’entraînent pour des compétitions en répétant une, deux, trois fois des « boardslides », une figure qui consiste à sauter avec sa planche perpendiculaire sur un rail métallique, puis à glisser dessus sans tomber. Elles sont venues, il y a deux ans, avec une copine et ne sont jamais parties.

Une tout autre expérience que celle vécue par Claire Barbier-Essertel, ex-championne de France dans les années 1990, qui se souvient : « J’ai vu des garçons faire du skate et j’ai trouvé ça joli. Je ne savais pas qu’il n’y avait pas de filles. » On est en 1996 à Saint-Etienne et elle grimpe sur une planche pour la première fois. Elle a 16 ans, se retrouve rapidement en compétition, mais aux championnats de France elles sont seulement trois filles.

Première « board »

Depuis, les skateuses ont gagné du terrain : la Fédération française de roller & skateboard comptabilise désormais 1 660 licenciées et 4 179 licenciés de skate. « Il y a une grosse différence avec la situation d’il y a dix ou quinze ans, avec un gros boom de la pratique féminine », confirme Claire Barbier-Essertel. Un engouement qui va de pair avec l’essor des sports de glisse urbaine – trottinettes, BMX et autres rollers –, déjà bien installés sur les trottoirs.

Certaines pratiquent aussi le surf ou le snowboard, d’autres ne sortent plus sans leur skate pour se déplacer, se changer les idées, par goût pour l’adrénaline ou les figures techniques. Nombreuses sont les jeunes femmes à avoir abandonné, avant de redécouvrir leur pratique. « Ma première “board” [planche], je l’ai eue à 11 ans. Mais mon voisin se moquait de moi, du coup j’ai arrêté », se souvient Camille, 29 ans, graphiste pour le magazine de skate féminin Mag de Zine. Il faudra attendre plusieurs années pour qu’elle remonte sur sa planche : le déclic a lieu à New York, en fréquentant un collectif de skateuses. « Avant ça, je n’avais jamais vu de skateuses pros. Cela m’a fait un choc. Une grosse colère s’est réveillée en moi. Si j’avais su que ces filles existaient, je n’aurais pas eu la même vie. »

Il vous reste 65.33% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Source