« L’enthousiasme pavillonnaire est inédit depuis la pandémie de Covid-19 »

Dans le sillage de la crise sanitaire, il n’y a rien d’étonnant à ce que le pavillon avec jardin, implanté à distance de la grande ville mais sans en être trop éloigné, continue d’être l’habitat idéal dans les représentations sociales des Français. De 1945 à nos jours, les statistiques révèlent de façon constante que 80 % des familles françaises témoignent d’une nette inclination pour la maison individuelle avec jardin. La France compte ainsi plus de 20 millions de maisons individuelles sur un total de 37 millions de logements.

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L’attachement au pavillon s’explique par un habitus culturel fait de représentations sociales positives sur la maison. Les habitants apprécient de pouvoir s’approprier pleinement les différents espaces, les aménager, les arranger ou les transformer à leur guise, de disposer de coins à soi et rien qu’à soi (atelier, bureau, etc.). Les familles aspirent également à ne pas être enfermées physiquement dans un immeuble collectif et assujetties juridiquement par un règlement de copropriété. L’habitant d’un pavillon dispose de la liberté de s’isoler de ses voisins et de jouer avec ses enfants dans son jardin. L’accession à la propriété permet d’acquérir un statut résidentiel stable, sécurisé, synonyme de constitution d’un patrimoine, ce qui est loin d’être anodin avant le passage à la retraite. Par ailleurs, l’achat d’un pavillon dans un lotissement vaut ticket d’entrée dans un « club résidentiel » : on intègre un groupe de résidents bénéficiaires d’un univers social, environnemental et sécuritaire distinctif et spécifique. Les lotissements, éloignés des dangers et des nuisances de la circulation automobile, offrent des espaces relativement sécurisés pour les enfants.

Plus encore, la maison avec jardin s’impose comme la forme urbanistique qui répond le mieux à ce qui s’apparente à un véritable tournant anthropologique quant à nos manières d’habiter. La pandémie de Covid-19 a révélé à quel point le pavillon avec jardin apparaît comme un « logement total » pouvant accueillir une grande variété d’activités et même de sociabilités, car il se prête facilement à de nouvelles appropriations, occupations et aspirations, à commencer par le télétravail, les loisirs ou encore l’entretien de son corps, en plus des activités traditionnelles comme la cuisine, le jardinage ou le bricolage.

Expression totale de soi

Autrement dit, la maison individuelle manifeste, après plusieurs périodes de confinement, tout son potentiel, et par voie de conséquence, toute sa plasticité structurelle tant au niveau des espaces et des temporalités que des manières de vivre. C’est dans l’habitat individuel que l’expression totale de soi a été le plus possible. Comme le montre l’envolée des prix de vente, l’enthousiasme pavillonnaire est inédit depuis la pandémie de Covid-19 : il s’impose au plus grand nombre comme une évidence, en dépit des critiques savantes, médiatiques et politiques, formulées par exemple contre « l’étalement urbain ».

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