Plus de 90 nouveaux opposants déchus de leur nationalité au Nicaragua

Des opposants politiques au régime de Daniel Ortega au Nicaragua récemment expulsés et déchus de leur nationalité tiennent une conférence de presse avec la maire du comté de Miami-Dade, en Floride, le 15 février 2023.

C’est un « saut dans le vide de la radicalisation autoritaire » de Daniel Ortega. Carlos Fernando Chamorro, directeur du média en ligne Confidencial, n’a plus de mots assez forts pour qualifier la dernière mesure du régime du président nicaraguayen. Le journaliste, qui se trouve en exil au Costa Rica depuis 2021, fait partie de 94 opposants qui viennent de se voir retirer leur nationalité, leurs droits civiques et leurs biens.

La mesure a été annoncée mercredi 15 février par le président de la cour d’appel de Managua, Ernesto Rodriguez Mejia. « Les accusés ont réalisé et continuent de perpétrer des actes criminels au détriment de la paix, de la souveraineté, de l’indépendance et de l’autodétermination du peuple nicaraguayen, en incitant à la déstabilisation du pays, en favorisant des blocus économiques, commerciaux et financiers, selon le magistrat. Pour ces raisons, ils ne peuvent être considérés comme des citoyens nicaraguayens. »

Traités de « malfaiteurs en fuite » et de « traîtres à la patrie », les « accusés », qui n’ont pourtant fait l’objet d’aucun procès et n’avaient pas été mis en examen avant cela, sont également « soumis à l’interdiction à perpétuité d’exercer des fonctions publiques » et des mandats électifs. Leurs biens ont été « confisqués en faveur de l’Etat nicaraguayen ».

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La mesure a été décrétée six jours après la libération et l’expulsion vers Washington, le 10 février, de 222 prisonniers politiques, eux aussi déchus de leur nationalité et de leurs droits, et après la condamnation à vingt-six ans de prison de l’évêque Rolando Alvarez, le lendemain.

« Une condamnation sans procès »

Parmi les personnes affectées par la mesure de ce mercredi, les écrivains Sergio Ramirez et Gioconda Belli, l’évêque Silvio Baez, la militante Vilma Nuñez, présidente du Centre nicaraguayen des droits humains (Cenidh), des personnalités politiques, des académiciens, d’ex-guérilleros sandinistes, des religieux, des journalistes, des intellectuels et d’anciens fonctionnaires. Quasi tous avaient déjà quitté le pays ces derniers mois.

« D’après notre évaluation, sur les 94, il n’y en a que deux ou trois qui sont encore au Nicaragua, précise au Monde Jimena Reyes, directrice pour les Amériques de la Fédération internationale des droits humains (FIDH). Cette résolution est un ovni juridique car c’est une condamnation sans procès. »

Mais le sort de Vilma Nuñez inquiète. Avocate, militante du Front sandiniste de libération nationale (FSLN) en lutte contre la dictature de la famille Somoza – elle avait été arrêtée en 1979 et brutalement torturée –, puis devenue opposante au régime de Daniel Ortega, au pouvoir de 1979 à 1990 et de 2007 à aujourd’hui, elle est une des rares à n’avoir pas voulu partir du Nicaragua.

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